Par le père Dino Gbebe
Chers amis, nous sommes tous dans un combat, nous sommes en lutte contre le diable. L’avez-vous remarqué ? Alors que les uns ne croient plus à l’existence du diable, d’autres, par contre, le voient partout. Dans certains milieux, on ne l’évoque plus que sous les traits d’un petit bonhomme biscornu, d’un autre âge, qui faisait frissonner les foules ; ailleurs, il occupe toute la scène et envahit l’espace, de plus en plus large, que l’homme, en quête de sensationnel, ne cesse de lui céder. S’il semble avoir disparu de certains environnements, c’est pour s’installer en roi dans d’autres milieux, où il se manifesterait à travers les possessions réelles ou supposées.
Face à ce constat, on n’a certainement pas tort de penser que l’une des astuces les plus réussies du diable c’est d’avoir réussi à dissimuler sa véritable identité sous le voile du silence ou du sensationnel.
L’évangile de ce premier dimanche de carême nous le montre sous son vrai visage de tentateur et de corrupteur. Dans le Nouveau Testament, rappelons-le, à 37 reprises, il est question du « diable », dont le nom signifie précisément : accusateur, trompeur, diviseur, calomniateur, celui qui fait tomber. Il est appelé également « Belzébul » (7 fois), « le malin », « le prince de ce monde ». L’existence du diable, abondamment illustrée dans les Saintes Ecritures, est donc à prendre au sérieux. En habile tentateur, il nous fait croire que nous pouvons obtenir davantage et mieux en nous passant de Dieu. Aussi promet-il le plaisir, la réussite et le bonheur faciles à condition que nous nous séparions du Créateur.
En redoutable séducteur, il agit par la ruse plutôt que par la force. Saint Paul n’hésite pas à dire qu’il peut même se déguiser en « ange de lumière ». Cependant, le diable peut également utiliser la terreur pour nous influencer. Il est « un lion rugissant » qui essaie de pousser sa proie vers la tanière où l’attend la lionne. Ainsi, en fixant trop notre attention sur lui, nous risquons de devenir ses victimes.
Il est le calomniateur, qui accuse Dieu devant l’homme et l’homme devant Dieu, en nous faisant croire que Dieu ne nous aime pas assez pour répondre à nos prières ou pour nous pardonner. En définitive, il est le « père du mensonge » qui utilise tous les moyens pour nous tromper.
Le récit qui nous est proposé ce dimanche le montre à l’œuvre dans l’exercice où il excelle le mieux, celui de séparer de Dieu en proposant des « biens » légitimes ou illusoires. Extrêmement rusée, sa tactique peut se résumer essentiellement en trois démarches :
– Faire passer le mal pour un bien : la tentation a toujours quelque chose d’alléchant. Le péché est toujours attirant, au point de départ. Il procure ou promet de procurer un plaisir. C’est en cela que la tentation se distingue de l’épreuve : la première vise à la satisfaction d’un désir, la deuxième est une détresse qui pèse sur l’homme. Pour tenter l’homme, le diable fait miroiter à ses yeux des biens illusoires ; pour l’éprouver, il fait peser sur lui des souffrances écrasantes. Le but, cependant, reste le même, amener l’homme à se séparer de Dieu.
– Engager le dialogue en partant d’un besoin de l’homme : nourriture, honneur, pouvoir, bonheur…En fin stratège, il transforme nos besoins légitimes en autant d’occasions de nous dresser contre Dieu ou de lui désobéir. Habile manipulateur, il trouve toujours des alibis à tout, en puissant ses arguments même dans la Parole de Dieu.
– S’insinuer dans l’esprit par la séduction et pousser à l’action par la passion. Après avoir séduit l’esprit, il stimule et déchaîne en nous la passion. La tentation devient alors presque irrésistible.
L’épisode de la tentation de Jésus au désert met en lumière les trois formes de tentation les plus fréquentes : la convoitise des biens matériels (changer les pierres en pain), la convoitise de succès facile (sauter du pinacle du temple) et celle du pouvoir (dominer la terre).Toutes les autres séductions se rattachent, de quelque manière, à ces inclinations.
Face à la pernicieuse stratégie du diable, le Christ nous rappelle les trois armes avec lesquelles, il doit être combattu :
– l’amour inconditionnel pour Dieu : l’unique objectif que poursuit le diable est de nous faire douter de l’amour de Dieu pour nous séparer de lui. Voilà pourquoi, nous ne pouvons espérer le vaincre qu’en réaffirmant notre option ferme pour le Seigneur.
– la vigilance dans la prière : « veillez et priez pour ne pas tomber en tentation », disait Jésus à ses disciples, la nuit de la passion. « Revêtez-vous de toutes les armes de Dieu, afin de pouvoir tenir ferme contre les ruses du diable » dira plus tard Saint Paul aux Ephésiens.
Dès le début de ce temps de carême, nous voici donc bien avertis. Que le Seigneur nous accorde la grâce de la vigilance pour savoir résister aux ruses du tentateur.