Homélie du 5e dimanche de Temps Ordinaire, C – 10 février 2019
dimanche de la santé
Par l’abbé
Gaël de Breuvand
Il
s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après
retranscription.
I – Quand Dieu se montre, je me vois tout petit
Aujourd’hui, dans ces lectures, il y a un certain nombre de personnes qui ont rencontré Dieu. Le premier, qui rencontre Dieu, c’est Isaïe ; nous sommes en 730 avant Jésus-Christ. Il est dans le temple, et là, Dieu se dévoile devant lui. Les séraphins crient « Saint, Saint, Saint, le Seigneur, Dieu de l’univers ! Le ciel et la terre sont remplis de Sa gloire. » C’est un texte que l’on connaît bien, qui montre que Dieu va se dévoiler, se montrer à nous. Et de fait, Isaïe est mort de peur car, face à Dieu si grand, il se voit tout petit. Alors que Dieu est saint, parfait, immaculé, pur, lui se voit pécheur. Et Dieu s’approche de lui, envoie son ange vers lui, et dit « je ferai de toi un homme pur. C’est moi qui te purifierai, c’est moi qui te rendrai saint. » Une fois qu’Isaïe a été rendu saint, purifié par l‘ange, la Parole de Dieu s’élève et dit « Mais qui enverrai-je pour dévoiler mon message, pour dévoiler ma Parole ? » Et là, Isaïe fait un pas, lève le doigt, et dit « Moi, moi, envoie-moi ! »
Bien des années plus tard, après Jésus, c’est saint Paul. Lui qui était persécuteur – il n’aimait pas les chrétiens considérés comme des mauvais Juifs — sur le chemin de Damas, il rencontre Jésus, il en tombe par terre. Ébloui au point d’être rendu aveugle, et là, il est converti. Lui aussi est impressionné par la puissance de Dieu, par le dévoilement de Sa splendeur. Lui aussi, le Seigneur l’appelle, alors qu’il est bien indigne. Il le dit lui-même : « Je suis le plus petit des apôtres parce que j’ai persécuté l’Église de Dieu. Il est apparu à l’avorton que je suis. » ‘Avorton’ est un terme très fort qui signifie : toute petite chose, qui ne vaut pas grand-chose. Et voilà que Dieu l‘a également appelé pour témoigner de ce que Dieu est. Finalement, quand Dieu se dévoile à nous, la première chose que l‘on perçoit, c’est d’abord notre faiblesse, notre petitesse, donc c’est plutôt bon signe. D’ailleurs, parfois, quand on a du mal à rencontrer Dieu, il faut peut-être d’abord réaliser sa petitesse : cela laisse de la place au bon Dieu. Quand Il se manifeste, je perçois ma petitesse et, quand je me fais petit, Il se manifeste à moi. Et Il appelle.
II – Le Christ appelle et envoie les petits
Il appelle les petits et les pauvres. Je vais nous envoyer à Lourdes, car demain c’est Notre-Dame de Lourdes, et à Lourdes, celle qui est appelée, Bernadette, c’est une petite fille qui a douze ans mais qui est plus petite que la moyenne, et qui est mal considérée. Pourtant, c’est cette jeune fille-là qui est appelée à porter un grand message. Et saint Paul nous le répète encore. Le message qu’il a à transmettre n’est pas compliqué : c’est Jésus-Christ : Jésus, Dieu fait homme, un homme mort sur la croix, Dieu mort sur la Croix. Ressuscité pour notre salut, parce Dieu nous aime. C’est cela la bonne nouvelle que saint Paul nous a annoncée et qu’il nous répète encore et encore : « Soyez dans la joie, le Seigneur nous aime. » « Je vous ai transmis ceci que j’ai moi-même reçu. » Cette parole est très solennelle. Elle n’apparaît que deux fois dans toutes les lettres de saint Paul. Une fois, pour nous parler, comme ici, du kérygme, du cœur de notre foi : le Christ est mort et ressuscité pour notre salut. Et puis, l‘autre fois, c’est pour nous parler de l’Eucharistie. Soit, les deux piliers : le fondement de notre foi, et la nourriture de notre foi.
III – Envoyés pour être partie prenante de l’œuvre de Dieu
Et puis, nous avons cet Évangile, où Jésus manifeste sa puissance, et il se dévoile comme plus qu’un homme : il se dévoile déjà comme Dieu, et saint Pierre en a bien conscience. « Seigneur », ce titre-là c’est un titre divin. « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. » Pierre a peur. C’est à ce moment que Jésus se penche vers lui et lui dit « N’aie pas peur » : c’est Moi qui sauve. Je ne suis pas là pour juger, je ne suis pas là pour condamner, je suis là pour sauver. Et même plus que cela. Je veux que vous soyez partie prenante du Salut que je veux donner au monde. « Ce sont des hommes que tu prendras ». Cette parole–là me fait penser à saint François d’Assise.
Nous sommes en Italie. Saint François d’Assise, c’est un jeune homme un peu fêtard : chrétien, mais il ne faut pas que cela change trop sa vie… Et puis, le voilà qui part en croisade, et il en revient car il rate son coup. En réalité, il rate un peu tout ce qu’il fait. Quand soudain, il croise un lépreux. Un lépreux, au xiiie siècle, c’est quelqu’un dont on ne s’approche pas, non seulement parce que sa maladie est laide, peut-être le reflet du péché – alors que Jésus a dit le contraire –, mais parce qu’il y a des chances que cela soit très contagieux. Donc, le lépreux est tenu bien à l’écart et on lui donne une cloche pour qu’il la sonne, afin que l‘on reste loin du son. Moins on le voit, mieux l’on se porte. Et voilà que de son cheval, François croise un lépreux. Et là, au fond de son cœur, il reçoit cette parole, ce commandement de Dieu : « ce lépreux, c’est une personne que j’aime, et j’ai donné Ma vie pour lui, et je veux que toi, François, tu ailles manifester cet amour pour cette personne, ce lépreux. » Alors, on peut penser que le premier réflexe de François est un mouvement de crainte, de dégoût. Mais, il y va. On peut imaginer que ce lépreux n’avait pas eu de contact humain depuis longtemps, de contact fraternel, physique, avec quelqu’un. Et François le prend dans ses bras et l’embrasse : « Tu es mon frère et Dieu t’aime. Et moi, je t’aime pour Dieu, au nom de Dieu. » On peut penser à la joie de ce pauvre qui avait besoin de ce contact. On peut aussi imaginer la joie de François – ce qui ne rend pas les choses faciles, c’est toujours un peu dégoûtant –, la vraie joie, d’avoir fait ce pour quoi il est fait, autrement dit, porter l’amour de Dieu.
Et de fait, lorsqu’on parle du service évangélique des malades, c’est bien de cela dont on parle. La pastorale de la santé, c’est prendre soin de ceux qui sont autour de nous, au nom de Dieu. Parce que Dieu a choisi de passer par nous pour manifester son Amour. C’est vrai pour les malades, mais cela vaut également pour tous ceux qui sont autour de nous. Nous sommes ici en mission : nous sommes faits pour aimer. Alors, aimons !