Mariage de Marie-Aimée et Frédéric
– Abbé Gaël de Breuvand
Aujourd’hui est un jour tout à fait particulier, puisque nous sommes avec Marie-Aimée et Frédéric, qui ont décidé de laisser leur eau être changée en vin par le Christ. Leur amour, qui est déjà un amour voulu de Dieu, déjà créé par Dieu, va être élevé, transformé. Ce qui va se passer pour eux dans quelques instants, c’est à peu près ce qu’il se passe tous les dimanches, à chaque messe : un peu de vin est transformé en sang du Christ : leur amour va être transformé en amour de Dieu. On change de catégorie.
I – Dieu nous regarde son peuple comme sa fiancée
Le mariage, l’union de l’homme et de la femme, est une image qui est courante dans toute la Bible. On l’a entendu d’ailleurs, au temps de la détresse, dans le Livre d’Isaïe, on est en plein exil : le peuple n’a plus de temple, plus de terre, peut-être même que le peuple croit que Dieu n’est pas très efficace. Et voilà que Dieu prend la parole et fait une promesse : « On ne t’appellera plus délaissée. » « Tu ne seras plus désolation mais tu seras l’épousée. » Dieu s’adresse à chacun de nous : comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu seras la joie de ton Dieu. Oui, le mariage c’est une image, c’est un reflet de l’Amour de Dieu pour nous. Alors, regardons Marie-Aimée et Frédéric, et projetons-nous, et pensons que c’est de cette manière-là que Dieu nous aime.
II – L’union de l’homme et de la femme : Signe de l’Amour de Dieu
Le texte des Noces de Cana, que l’on vient d’entendre, commence par « En ce temps-là ». Or quand on prend une Bible, il est précisé que c’est 3 jours plus tard, après que l’on a parlé de Jésus. Et quand on prend notre Bible au chapitre 1 de l’évangile selon saint Jean, on constate que, chaque jour, il se passe quelque chose, et puis 3 jours après… Il y a une semaine complète qui est déroulée comme cela. Ce 3e jour, c’est le 7e jour, après l’apparition de Jésus dans l’Histoire. Un 7e jour, cela nous fait penser à la Création et à l’achèvement de la Création, au moment où Dieu se repose et où il contemple son Œuvre, et il peut dire « Oui, cela est bon ». Et savez-vous ce qui conclut la Création ? C’est l’Homme, l’être humain : homme et femme. Cet homme qui reconnaît en sa femme la chair de sa chair, l’os de ses os, et qui peut dire « je me donne à toi et je te reçois. » Et cette femme qui reconnaît cet homme et qui lui dit « je te reçois, toi, et je me donne à toi ». C’est cela l’achèvement de la Création, et c’est cela que Dieu contemple et dont il se réjouit.
Aux noces de Cana, Jésus est à nouveau présent à un mariage, et Il vient confirmer que le mariage est bon et voulu de Dieu. Il vient le bénir à nouveau. Et puis, il y a un deuxième sens à la présence de Jésus au mariage. Lorsqu’Il vient quelque part, c’est qu’il y a quelque chose à sauver. Oui, tous ceux qui sont mariés le savent bien, dans le mariage, la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Parfois, il y a des combats, souvent même, des grands moments de tristesse et de désolation. Et de fait, on a besoin de Dieu, du Christ, qu’Il vienne nous sauver dans cette dimension de nos vies. Jésus est présent à ce mariage, Il le bénit, et Il le sauve. Et aujourd’hui, dans cette église, le Christ est présent, comme Il l’était aux noces de Cana.
III – La place de Marie
« En ce temps-là, il y eut un mariage, à Cana de Galilée, et la mère de Jésus était là. » Cela arrive un certain nombre de fois, dans l’Évangile, ces moments où Marie est présente. Celle-ci s’adresse à son Fils, et son Fils lui dit « Femme, que me veux-tu ? » Cette parole est rude : « Femme, que me veux-tu ? » Qu’y-a-t-il entre toi et Moi ? Et elle est encore plus rude en grec… « Femme ». Jésus s’adresse assez peu souvent à sa mère dans l’Évangile. Et, dans celui de saint Jean, il ne s’adresse à elle que deux fois : une fois ici, et il l’appelle « Femme », et une autre fois au pied de la Croix, et, à nouveau, il l‘appelle « Femme », lorsqu’Il nous la donne comme mère. Il s’adresse au disciple bien-aimé, qui est chacun de nous, et il lui dit « Voici ta mère » et Il s’adresse à Sa mère en disant « Femme, voici ton fils ».
Ici, Marie est présente ; ce n’est pas encore explicite, mais elle agit déjà en tant que mère. Elle constate cette absence : ils manquent de vin. Alors la mère de Jésus dit « ils n’ont pas de vin ». Il manque l’essentiel… symboliquement bien sûr, (il ne s’agit pas de devenir alcoolique !) car le vin c’est ce « qui réjouit le cœur de l’Homme » , c’est l’allégresse qui nous est donnée. C’est cela la symbolique du vin dans la Bible : Quand ils n’ont pas de vin, c’est qu’il n’y a pas de joie. Il manque donc l’essentiel à ce mariage qui est en train de se réaliser, il manque le cœur. Alors, Marie, délicatement, avec tout l’amour possible, s’approche de Jésus et dit « ils n’ont pas de vin ». Elle agit comme mère, cela vaut le coup de la prendre comme mère, de faire comme le disciple bien-aimé et de prendre Marie chez soi pour qu’elle puisse, délicatement, toujours prendre soin de nous.
IV – L’Eucharistie, référence du sacrement de mariage
Et Jésus répond « Mon heure n’est pas encore venue ». Cette heure, dont Jésus parle plusieurs fois dans l’Évangile, comme par exemple dans le texte de la Samaritaine, qui est au chapitre 4, « Mon heure vient », l’heure vient où on adorera le Père en Esprit et en vérité. « Mon heure ». L’heure qui vient c’est le moment où Il se met aux pieds de ses disciples et il les lave. L’heure qui vient, c’est celle de la Croix. L’heure qui vient c’est le moment où Dieu accomplit son Salut où il renouvelle l’alliance entre Lui et nous. C’est le moment où Il nous donne d’être établis comme épouses du Christ. Oui, il veut renouveler, accomplir, cette Alliance qui est prévue depuis toute éternité entre Dieu et son peuple. L’heure qui vient, elle va se manifester avec du vin. De fait, on a beaucoup de vin dans cet Évangile : plus de 600 litres d’eau sont transformés en vin ! J’ignore si vous savez réellement ce que cela représente. Lorsque nous faisons une fête paroissiale et qu’il y a environ 300 personnes, nous consommons à peu près 40 litres de vin, donc 600 litres cela fait vraiment beaucoup ! Le Christ aurait pu se satisfaire de faire simplement la quantité nécessaire, mais non, il y a profusion. Le Seigneur donne beaucoup plus que ce dont on a besoin. Il faut juste ouvrir les yeux et s’en rendre compte. Il donne.
Et ce vin est l’annonce d’un autre vin, celui que le Christ prendra au Dernier Repas et Il dira : « Ceci est mon Sang ». Ce vin qui devient le Salut du monde. Ce vin qui est une annonce du sang que le Christ verse sur la Croix. Ce vin qui devient le Sang du Christ à chaque messe et auquel nous sommes invités à boire. À chaque Eucharistie, le Seigneur prend du pain, il le bénit et il dit « Ceci est Mon corps ». Ce Pain, vous le connaissez, l’Hostie, c’est un morceau de pain sec, pas très bon. Symboliquement, c’est la suite du pain azyme, que l’on mange avec les herbes amères lorsque l’on n’a pas le temps de le préparer et qu’il faut fuir l’Égypte pour entrer dans le désert : c’est le début de l’Exode. Symboliquement, Dieu nous donne l’essentiel : ce qui tient au corps. Ce pain qui nous permet d’avancer. Et puis, pour l‘Eucharistie, on utilise ce pain-là, qui devient Corps du Christ, et on utilise le vin qui, symboliquement, évoque la joie de Dieu qui nous est donnée. C’est tout ce qui est la largesse, la profusion divine : Dieu donne encore plus. Dans l’Eucharistie, ce sont ces deux dimensions, ces deux symboliques, qui sont réunies, à chaque messe… Par la voix du prêtre, le Christ dit « Ceci est Mon corps donné pour vous, Ceci est Mon sang versé pour vous». À Cana, c’est déjà cela qui se passe puisque l’heure du Christ commence et qu’en transformant cette eau en vin c’est déjà le Sang du Christ qui est donné. Dans quelques instants, nous aurons la messe, l’Eucharistie accomplie : « Ceci est Mon corps donné pour toi » .
V – Recevoir le don de Dieu, pour le donner, pour se donner
Et, dans quelques instants, nous aurons un mariage lors duquel nous entendrons Frédéric et Marie-Aimée se dire mutuellement : « je te reçois, je te donne ma vie, toute entière, je ne retiens rien. » Ce sera un accomplissement, car cela fait longtemps qu’ils ont commencé à faire ce don. Mais, pour autant, aujourd’hui, ils demandent au Christ d’être là, avec eux, d’ajouter quelque chose : cette joie. Ils demandent au Christ de pouvoir être réellement les témoins de Dieu pour nous.
Parce que le cadeau que Dieu va leur faire, il n’est pas que pour eux. Et c’est peut-être cela la finalité des Noces de Cana qui vient se conclure avec la Première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens, cette deuxième lecture que l’on a entendue : « les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit ». Dans quelques instants, Marie-Aimée et Frédéric vont recevoir l’Esprit de Dieu qui va les unir ensemble. C’est déjà beau, mais ce n’est pas seulement pour eux : ils vont devenir foyer. Comme cette cheminée, ils vont rayonner de l’Amour de Dieu. Et l‘Esprit qu’ils vont recevoir, ils vont le transmettre.
C’est cela l’intérêt de se marier : le cadeau que l’on reçoit, l’union qui s’accomplit, elle est pour moi et mon épouse, mais aussi pour tous ceux qui sont autour de moi. Et quand je dis pour moi, je ne me trompe pas beaucoup, puisque l’ordination revient pratiquement au même… Lorsqu’un prêtre est ordonné, c’est un peu pour lui, mais beaucoup pour les autres. Quand on se marie, le mariage est reçu pour soi, et beaucoup pour les autres. Lorsque l’on reçoit l’Eucharistie, la communion, elle est reçue pour soi, et beaucoup pour les autres. C’est cela tout l’élan de notre vie : établir une relation avec Dieu pour permettre à Son amour de pouvoir rayonner à partir de nous. Alors, aujourd’hui, je vous le souhaite à tous, et en particulier à Frédéric et Marie-Aimée, mettez le vin du Seigneur dans vos vies, et mettez la vie de Dieu, Son esprit, dans votre vin.