Homélie de la solennité de la naissance de saint Jean-Baptiste, Année B, 24 juin 2018
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
Cet évangile, cette naissance de Jean et sa nomination… Il manque un passage ! Il n’est pas tout-à-fait complet cet évangile. Lorsque Zacharie ouvre la bouche, « il parle et il bénit Dieu ». Dans le texte biblique, il y a, à ce moment-là, le Benedictus : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, qui visite et rachète son peuple ». Cette prière que tous les matins, l’Église chante. Tous les matins, l’Église fait mémoire, se rappelle, se souvient de ce jour où Zacharie a béni son fils en bénissant Dieu. Et il y a cette parole, que l’on a entendu dans le verset de l’alléluia : « Toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-haut ». Toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-haut…
Il se trouve qu’hier, – vous le savez certainement -, il y avait une fête diocésaine avec les ordinations et il y a eu 4 diacres et 6 prêtres qui ont été ordonnés. C’est une grande joie ! Et le cardinal aime à nous partager le fait que chaque fois qu’il dit le Benedictus, et qu’il passe sur cette parole : « et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-haut », il pense à ses séminaristes. « Toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-haut ! » Et donc cela réjouit les séminaristes de l’entendre dire cela car cela veut dire que tous les jours, le cardinal prie pour eux.
Mais en fait, cette parole, elle ne s’applique pas qu’aux prêtres et aux diacres. Elle s’applique aussi à tous les baptisés. À tous les baptisés (et même à tous les enfants qui naissent en général). Et la question qui se pose et qu’on devrait se poser, – peut-être qu’on ne se la pose pas suffisamment -, [on se pose la question : « quel est son nom ? quel est son poids ?« …] c’est « que sera cet enfant ? »
I – Une coopération entre Dieu et l’homme
« Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du très-haut ! ». Au jour du baptême, nous sommes connectés au Christ, vous le savez, Il est le prêtre, le prophète et le roi. À l’instant où nous sommes baptisés, nous devenons prophète du Très-haut. Nous pouvons être appelés prophète du Très-haut, comme Jean l’a été. Comme les prêtres et les diacres qui ont été ordonnés hier le sont. Comme chacun de nous, puisque nous sommes appelés par le baptême. Nous sommes confirmés, envoyés, pour être prophète. Jean lui-même n’a ce titre de prophète que parce qu’il est lui-même absolument connecté à Jésus. Ce qui fait que lorsqu’il va voir Jésus, il va le reconnaître. Et non seulement il le reconnaît, mais il nous le montre : « le voici l’agneau de Dieu ».
Vous savez comment se passe une conversion. Quand quelqu’un se convertit, il faut deux éléments, parce que Dieu a décidé qu’il y avait besoin de ces deux éléments : L’élément auquel on pense en premier, peut-être le plus important, c’est l’action de Dieu. Évidemment. Dieu agit dans le cœur de celui qui va rencontrer le Christ. Et puis il y a un deuxième élément, qui est absolument nécessaire : il faut une personne humaine, l’un de nous. Il faut l’un de nous. L’un de nous qui va témoigner de l’amour du Christ, qui va témoigner de la joie du Christ et qui du coup va ouvrir la porte par laquelle le Seigneur va pouvoir s’engouffrer. Parfois cela se passe comme cela. Parfois cela se passe dans l’autre sens. C’est le Seigneur qui donne une bonne secousse et l’homme et la femme se met en marche, se met à chercher, et il découvre le Christ. Mais en tous les cas, Dieu a choisi d’avoir besoin de nous ! de moi ! de vous !
II – Jean, entrée dans la nouvelle-Alliance
Il est compliqué de nommer cet enfant qui naît. On veut l’appeler Zacharie. Alors Zacharie, c’est le nom qui est bien connu dans la famille. On s’inscrit dans une tradition. Et non seulement cela, puisqu’en fait, Zacharie, cela veut dire « Dieu se souvient ». Et donc on fait mémoire des merveilles de Dieu dans l’histoire. Chaque fois que Dieu s’est souvenu de nous ! Il s’est souvenu de nous dès la création, Il se souvient de nous avec Abraham, Il se souvient de nous avec Moïse et la libération de l’Égypte, Il se souvient de nous avec David, Il se souvient de nous avec le retour d’exil.
Avec, peut-être, une petite limite à cette mémoire, c’est que toutes les merveilles, Dieu les a faites. Et aujourd’hui, on attend le messie et on a un peu l’impression qu’il n’en fait plus des merveilles ! Et voilà que la maman s’oppose et dit : « Non. Il ne s’appellera pas Zacharie, il s’appellera Jean”. Alors à l’époque, il faut quand même avoir la confirmation du père. Donc on se tourne vers le père et on lui demande : “mais… t’es vraiment sûr ?” Et il répond : “Jean sera son nom”. Pourquoi ? Parce que Jean, c’est l’entrée dans une nouvelle alliance. Finalement, Zacharie, c’était encore le nom de l’ancienne alliance. Jean, c’est le nom de la nouvelle alliance. Et cela signifie : “Dieu fait grâce”. Dieu donne son amour. Dieu donne sa vie. Dieu fait grâce. On avait : “Dieu se souvient”. Une chose qui finalement était passée… Et là, on a : “Dieu fait grâce”. Ça, c’est extrêmement au présent, c’est là ! au présent ! “Dieu fait grâce”. Et nous savons bien à quel point Il fait grâce puisque, d’abord, Elisabeth a eu un enfant. Elle qu’on appelait « la femme stérile ». Et ce n’était pas bien d’être stérile à l’époque. Eh bien Dieu lui montre la grandeur de sa miséricorde. Dieu lui fait grâce ! Pareil pour Zacharie. Lui qui avait douté, voilà qu’il retrouve sa voix et qui peut bénir le Seigneur. Dieu leur fait grâce. Et non seulement Dieu leur fait grâce à eux, dans leur vie personnelle, mais en plus, Dieu nous fait grâce à tous. Parce que lorsque Jean arrive, cela annonce que le Messie vient. Et ce Messie, on l’appelle Jésus, et cela veut dire : “Dieu sauve”. Dieu fait grâce en nous sauvant. En nous sauvant de nos enfermements, de nos égoïsmes, de tout ce qui nous entraîne à la mort.
« Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du très-haut ! » Dieu se souvient et surtout, Dieu fait grâce, ici et maintenant ! Et Dieu fait de vous, tous !, des Jean. Des “Dieu fait grâce”. Dieu veut passer à travers vous pour se faire connaître aux hommes de Brignais et de Chaponost. Il veut passer par nous, pour que nous soyons des témoins de son amour et de sa miséricorde et que nous rayonnions de Sa joie.
Alors tournons-nous vers le Seigneur. Reconnaissons-le, l’Agneau de Dieu, que Jean nous a désigné. Et à notre tour, désignons-le aux hommes et aux femmes de notre temps. Laissons-nous transformer par le Christ, pour que l’on puisse dire en vérité de nous : « Tu es prophète du très-haut ».
III – Reconnaitre que Dieu nous a choisis
Et je conclurai avec un tout petit point. On pourrait se dire : “oui, mais quand on se fait appeler prophète du très-haut, quand on nous dit Dieu nous fait grâce… Quand on nous dit : “Dieu nous choisit pour être des témoins de son Amour… Est-ce que l’on ne se pousse pas un peu le col ? Est-ce que l’on n’est pas un peu orgueilleux, là ?”
Alors on pourrait ! On pourrait si on croyait que tout cela vient de nous. Si on croyait que la sainteté, c’était grâce à nous. Or, non. La sainteté, ce n’est pas grâce à nous. Être prophète, ce n’est pas grâce à nous. D’ailleurs, les fois où l’on essaie d’être prophète par nous-mêmes, en général, on se trompe. Soit on s’écrase, soit on n’est pas ajustés. Non. C’est bien Dieu qui dépose en nous le trésor. Ce trésor qui me permet de dire : « je reconnais devant Toi le prodige, l’être étonnant que je suis ». C’était le psaume…
Je reconnais le prodige, l’être étonnant que je suis, mais je sais bien que ce n’est pas grâce à moi. C’est Toi qui fait tout en moi. Seigneur, donne-moi de t’accueillir, d’accueillir Ta grâce ! Donne-moi d’être ton témoin. Donne-moi d’être un messager de ta joie.