Homélie de la messe du Jeudi Saint, en mémoire de la Cène du Seigneur, 29 mars 2018
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après retranscription.
Le Jeudi Saint. Nous fêtons l’institution de l’Eucharistie. Et nous avons le récit du lavement des pieds.
Tout à l’heure, en commençant la messe, nous avons fait le signe de la croix. Et nous sommes entrés dans une célébration qui va s’étendre sur trois jour. Notre prochain rendez-vous, on ne commencera pas la messe, – parce que d’ailleurs ce sera l’office de la croix -, et on ne le terminera pas non plus. On partira en silence. Et la vigile pascale, nous ne la commencerons pas réellement, et nous attendrons la fin pour recevoir la bénédiction, l’envoi en mission. Une célébration qui est commencée depuis quelques minutes, et qui se poursuit pendant trois jours.
I – Lavement des pieds
Alors un lavement des pieds pour marquer l’institution de l’Eucharistie. Trois évangélistes nous disent : “voilà ce que Jésus a fait”, et le quatrième dit autre chose. Alors nous pouvons croire la parole de Dieu et en fait, le lavement des pieds et l’Eucharistie, c’est sans doute la même chose ! C’est sans doute la même chose.
D’ailleurs ce lavement des pieds, certains se sont posé la question de savoir pourquoi on n’avait pas choisi ce rite-là comme rite d’ordination des prêtres. En dehors du fait que cela ne serait pas très pratique, on a préféré utiliser l’imposition des mains qui indique l’envoi de l’Esprit Saint. Mais ce que fait Jésus pour ses douze apôtres, c’est bien de les choisir et de les envoyer : “ce que j’ai fait pour vous ; faîtes de même, vous aussi les uns pour les autres”. Et puis, ça irait bien, parce qu’un prêtre, qu’est-ce que c’est ? On parle du sacerdoce ministériel. C’est un ministre. Ministre de l’Eucharistie, ministre pour le peuple. Et un ministre, en latin “ministerium”, c’est le serviteur. Un ministre, c’est un serviteur. Le Christ se présente comme un ministre, Il se présente comme le Christ serviteur. Il se met aux pieds de ses disciples. Et ça tombe bien parce que, nous, prêtres, nous sommes tous passés par une étape avant d’être ordonnés prêtres, c’est que nous avons été ordonnés diacres. Et en grec “diacre”, ça veut justement dire serviteur. Et cela, nous le restons.
Alors en recevant cette dignité de prêtre, nous recevons un ‘pouvoir’. Alors quel est-il ce pouvoir ? Jésus nous le montre. Notre pouvoir, c’est de laver les pieds abimés. C’est de laver les pieds blessés. Prendre soin. C’est cela, essentiellement, le pouvoir du prêtre. Et puis, il y a une deuxième dimension, c’est bien là aussi ce que fait Jésus, en prenant soin de ses disciples, Il les appelle et Il les envoie, pour que à leur tour, eux aussi, prennent soin, lavent les pieds.
Alors ce ‘pouvoir’ là, c’est un signe. Si le prêtre doit, – et d’ailleurs quand il ne le fait pas, c’est un objet de scandale -, si le prêtre doit être véritablement serviteur, c’est pour que chacun des chrétiens, donc nous, nous soyons serviteurs. À l’image du Christ ! Serviteurs.
Tout à l’heure, nous allons reproduire ce geste du lavement des pieds. Et ceux qui seront assis, là, à attendre que le prêtre, à leurs genoux, leur lave les pieds, ce sont les confirmands de cette année. En fait, ils sont exactement à la place des apôtres. Le Jeudi Saint, Jésus leur lave les pieds et cinquante jours après, pour la Pentecôte, ils recevront l’Esprit Saint. Et à ce moment-là, ils comprendront véritablement ce qu’ils ont reçu ce jour du lavement des pieds. Eh oui ! Ils se mettront à proclamer la Bonne Nouvelle. Ils se mettront à proclamer les merveilles de Dieu. Et ils se mettront au service. Voilà ce à quoi nous fait penser ce rite, ce sacrement du lavement des pieds.
II – Eucharistie
Et ce sacrement du lavement des pieds, il vient pour nous, dans notre liturgie, comme une introduction à un autre sacrement, celui qu’on appelle l’Eucharistie, dont saint Paul nous parlait. Nous accomplissons un mémorial, tout comme les Juifs, les Hébreux, réalisaient le mémorial de la Pâque se souvenant du jour où Dieu les a libérés d’Égypte, nous célébrons l’Eucharistie, mémorial de notre libération. On dit que l’Eucharistie, c’est la source et le sommet de toute vie chrétienne. C’est au début, et c’est à la fin.
Au début, c’est une source. C’est d’elle que découle le fleuve qui nous remplit de charité et qui va pouvoir nous permettre de vivre vraiment en chrétien. Qui va pouvoir nous permettre de nous mettre véritablement au service les uns des autres au sein de la communauté, avec toute la bienveillance nécessaire. Et puis au service de ce monde qui est autour de nous et qui ignore que Dieu est Amour. Alors de cette source-là coulent les fleuves d’Amour qui nous envoient porter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
Et puis c’est le sommet, parce que c’est l’accomplissement de ce pour quoi nous sommes faits : rendre grâce, rendre gloire à Dieu. Et rendre gloire à Dieu, nous ne pouvons le faire véritablement que si nous avons laissé la charité infuser toute notre vie. Que si véritablement, nous avons quelque chose à offrir. On me le disait il n’y a pas très longtemps : “qu’est-ce que j’ai à offrir, moi ? Quel acte d’amour j’ai pu poser ?” Alors si, – de fait, on le sait bien -, si je passe directement de la source au sommet, il manque quelque chose au milieu. C’est bien pour cela que nous sommes appelés tous les dimanches et même à chaque messe : “Allez. Allez dans la paix du Christ. Allez porter la paix du Christ, l’Amour de Dieu au monde”.
Un envoi
Alors oui, dans ce lavement des pieds et dans cette Eucharistie, c’est peut-être cela le point. La chose que nous pouvons retenir. La chose qui nous permet de nous poser vraiment contre le cœur de Jésus comme saint Jean l’a fait. Soyons les uns envers les autres dans la bienveillance, dans l’attention, dans le souci. Portons-nous les uns les autres. Et puis, entendons cet appel, cet appel du Christ, à ce que nous, communauté chrétienne à Brignais et Chaponost, nous nous mettions véritablement au service de ceux qui sont là dehors, et qui ne savent pas ce qu’ils manquent. Qui ne savent pas ! Et qui, sans aucun doute, cherchent.
Laissons-nous laver les pieds par le Christ et à notre tour, allons laver des pieds.