Homélie de la Solennité de l’Épiphanie du Seigneur, Année B
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après retranscription.
I -Tous les peuples sont appelés au Salut
Saint-Paul, dans la deuxième lecture, – c’est celle qu’on n’écoute pas souvent -, il nous invite à réfléchir au mystère qui nous a été donné et que saint Paul a porté tout particulièrement. Et ce mystère, ce n’est pas quelque chose qu’on ne peut pas comprendre, c’est pas quelque chose qui reste impossible à percevoir, c’est quelque chose dans lequel nous pouvons pénétrer. En fait, nous pouvons nous laisser entourer par lui.
Et donc ce mystère qui nous est donné, c’est que Dieu est venu pour tous les hommes. Sans exception aucune. Tous, nous sommes appelés à rentrer dans une relation d’amitié avec le Christ. Nous sommes invités à entrer dans une relation d’amour avec notre Dieu. Le signe qui nous a été donné, c’est un petit bébé. Et ce petit bébé, c’est bien pour nous montrer que Dieu est quelqu’un qui se fait proche, proche de nous. Toutes les nations, tous les peuples sont appelés pour cela. Et c’est bien ça le mystère, le cœur de la Fête de l’Épiphanie. Épiphanie, ça veut dire manifestation à l’extérieur, révélation. Le fait que ce soit montré à tous.
II – Dieu exposé, un appel pour chacun
Alors, en fait, si on réfléchit quelques instants, on se pose la question : “mais s’il se montre à tous, petit enfant dans la crèche, est-ce qu’il y a quelque chose de changé par rapport à la semaine dernière ou il y a deux semaines ?” La différence, c’est qu’Il est là présent, exposé, et que sa présence même est un appel. Alors on a eu les bergers qui sont venus. Et on a aujourd’hui les mages qui viennent de loin. Ils viennent tellement de loin que le texte nous dit que ce sont des mages venus d’Orient et que la Tradition chrétienne, la prière des chrétiens a dit que ces mages, ils étaient non seulement venus d’Orient, d’Asie, mais aussi d’Afrique et d’Europe. Melchior, Balthazar, Gaspard. Donc ils viennent vraiment du monde entier pour accomplir ce qui doit être fait devant ce petit enfant.
Cette présence, cette exposition de Jésus, enfant de Dieu lui-même au milieu de notre monde, c’est un appel à la conversation. Un appel à être en amitié avec Dieu. À la considérer comme un égal, parce qu’Il se fait notre égal. Finalement, lorsque Dieu se fait homme, lorsque Dieu devient pleinement homme, Il prend une initiative, c’est qu’Il nous appelle à être ses amis. Il se met à notre portée. Cet invisible, puissant, qui pourrait sembler pour nous distant, voilà qu’Il est là, présent au milieu de nous. Alors à cette présence de Dieu, nous sommes invités à répondre. Alors quelle va être notre réponse ? C’est là qu’on peut regarder les mages.
III – le cadeau des mages, notre cadeau
Les mages que nous appelons dans notre tradition “les rois mages”, même si là encore dans le texte biblique, on n’a pas de rois. Même si on a entendu la première lecture, – vous savez, celle que l’on a chanté en premier chant -, cette première lecture qui parle des rois justement, qui viendront du monde entier pour adorer le Roi. Le psaume aussi, qui nous parle de ces populations d’Épha, de Saba, de Qédar, qui sont toutes des régions qui sont autour de Jérusalem, et qui généralement étaient considérées par le texte biblique, par la Bible, comme des ennemis des Hébreux. Et même ces peuples ennemis, ils sont appelés à venir se prosterner aux pieds du roi, de ce petit enfant. Et ces peuples, Épha, Saba, Qédar, c’est des peuples où il y a aussi des grandes richesses. Et ces riche
sses, – parce que ces peuples-là, c’est nous -, nous sommes tous invités à les apporter au pied de Dieu. Mais est-ce que c’est de l’encens ? ça rappelle que Jésus est Dieu. Est-ce que c’est de l’or ? ça implique que Jésus est roi. Est-ce que c’est de la myrrhe ? ça implique que Jésus est pleinement homme. Est-ce que c’est cela que nous devons apporter ? Est-ce que c’est cela notre plus grand trésor ? Non, vous le savez bien.
Le trésor que nous sommes invités à porter aux pieds de ce petit roi, de ce Dieu qui se fait Homme… c’est nous-mêmes. C’est nous-mêmes… C’est cela le grand trésor. Notre cœur tout entier. Et c’est cela que font les mages. S’ils apportent l’or, l’encens et la myrrhe, ce n’est pas quelque chose d’extérieur à eux, c’est pas ça le plus important. Le plus important, c’est que eux viennent. Ils tombent à genoux. Ils se prosternent et ils reconnaissent en Jésus Dieu qui vient nous sauver.
IV – La démarche des mages
Alors on peut faire comme eux. Il y a plusieurs étapes dans la démarche des mages.
Tout d’abord pour pouvoir aller à la rencontre de Dieu, il faut se mettre à sa recherche. Et il y a pas de doutes : s’ils ont vu l’Étoile, c’est qu’ils la cherchaient. Alors nous sommes invités à nous mettre en quête de cette étoile, de ce qui nous montre Dieu dans notre monde. Et lorsque nous avons vu cette étoile, est-ce qu’on s’arrête là ? Non, on avance au contraire, on fait un pas de plus et on se met en route. On part de là où nous sommes. Mise en route… c’est parfois inconfortable. On préfère rester dans notre confort, dans nos habitudes. On se met en route… et on arrive aux pieds de ce petit enfant Jésus. Et on se prosterne à ses pieds. On peut le faire physiquement. On a le droit… On peut se mettre à genoux. Ça peut nous aider à plier notre cœur devant Dieu. Quand on se prosterne, on se descend plus bas que terre, on se fait petit pour reconnaître que Jésus est Dieu. Pour reconnaître qu’on a besoin de Lui et c’est Lui qui nous élèvera et qui fait de nous ses amis. Et nous allons l’adorer. L’adorer. Adorer, c’est approcher notre bouche de Lui. Nous allons le prier avec tout notre cœur, avec toute notre tendresse. Tout notre être.
C’est cela. Le chercher,
se mettre en route, se prosterner, L’adorer. C’est la démarche des mages. Et nous pouvons le faire. Jésus est présent, exposé comme petit enfant à la crèche et cette présence est un appel.
Et nous chrétiens catholiques, dans nos églises, le Christ est présent, exposé. Il est là ! C’est la grande différence d’ailleurs avec les chrétiens protestants. Les chrétiens protestants, quand le culte est fini le dimanche, eh bien on ferme le Temple, et c’est fini et on se retrouvera Dimanche prochain. Pour nous catholiques, Jésus est présent dans l’Eucharistie, substantiellement. Une présence qui se maintient, qui reste. Et cette présence au tabernacle, elle nous appelle. N’hésitons pas à venir rencontrer Dieu. À venir nous prosterner, à venir L’adorer, à venir prendre du temps et être comme un ami parlant à un ami. Voilà. Les mages, c’est cette démarche. Et nous sommes invités à faire comme eux.
V – La mécanique du cœur
Et puis : « avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ». Si nous sommes venus d’une certaine manière, tel que nous sommes, auprès du Christ, nous ne pouvons pas décemment repartir d’auprès de Lui de la même manière. Il nous faut changer. Et ça, c’est un travail qu’il nous faut faire sur nous-mêmes. Pour changer, ce n’est peut-être pas d’abord un acte de la volonté, de ma volonté, mais c’est d’abord d’accepter que le Christ vienne habiter chez moi. En fait, toute notre vie va consister en cela. Se rapprocher du Christ, pour pouvoir repartir de Lui. Comme le cœur qui se contracte et qui se dilate. Et puis du coup le sang va pouvoir être évacué du cœur, renvoyé pour porter l’oxygène à tous les membres ou au contraire être aspiré près du cœur près des poumons pour pouvoir se remplir d’oxygène. Eh bien nous, dans notre relation avec le Christ, nous faisons bien un peu pareil. Nous nous rapprochons de Lui, nous accueillons Son amour de telle sorte à pouvoir le porter au monde. C’est cela. Diastole-systole dira-t-on pour le cœur.
Mon souhait pour l’année qui commence, c’est que toute cette année, vous soyez comme des cœurs. Que vous accueilliez dans votre vie l’Amour de Dieu afin de pouvoir le donner à tous.
Finalement les mages, lorsqu’ils repartent, ils repartent comme des porteurs de Lumière. L’étoile a disparu parce que l’étoile, c’est eux maintenant. Alors nous tous, nous avons à être ces étoiles pour notre monde. Et si nous voulons être pleinement une étoile, il nous faut accueillir la lumière qui ne vient pas de nous, mais celle qui est du Christ, Jésus Lui-même. Ce Dieu qui se fait proche de nous, avec qui nous pouvons entrer en pleine relation, qui nous apprend à aimer, qui nous apprends à faire ce pour quoi nous sommes faits. Qui nous apprend à aimer.