Par l’abbé Gaël de Breuvand
(Les titres sont ajoutés après retranscription ; c’est pourquoi le style reste oral).
Voilà, comme vous avez pu le constater, nous avons une entrée dans l’église en fanfare et nous proclamons notre joie. Et puis dès que nous arrivons à l’autel, l’ambiance change et devient plus sobre, plus sérieuse, profonde peut-être… Alors peut-être que l’on peut se poser une question d’abord : pourquoi faire une procession ? Pourquoi, chaque année, à la période des Rameaux, se retrouver à l’extérieur de l’église et répéter ce qui a été fait une fois à Jérusalem ? Eh bien… la réponse, elle est d’abord que Jésus nous appelle à la suivre. Nous voulons le suivre, dans toute notre vie. Et de temps en temps, nous avons besoin de poser des actes concrets, un peu rituels, pour nous rappeler que c’est bien cela notre vie : c’est de suivre le Christ.
I – Le chemin du Christ
Alors quel chemin le Christ nous appelle-t-il à suivre ? Bah tout d’abord, au chapitre 16 de l’évangile selon saint Matthieu, c’est un petit peu après la moitié, il y a eu tout au Nord de la Galilée un évènement : Pierre a reconnu en Jésus le fils du Dieu vivant, le Messie. C’était cette profession de foi. Et à cet instant, Jésus a commencé à parler de ce qui l’attendait à Jérusalem : de sa Passion et de sa mort et Il s’est mis en route. Et du Nord de la Galilée, Il est parti vers le Sud et il est parti par Jéricho et Il veut aller à Jérusalem en pèlerinage. Pèlerinage dans cette vielle qui est le lieu adéquat, le lieu voulu par Dieu pour la rencontre entre Dieu et son peuple. Jésus, dans son pèlerinage, veut venir à la rencontre du Père.
Et nous ? Nous sommes aussi invités à aller à la rencontre du Père. Jésus vient y fêter la Pâques. Vous vous souvenez, la Pâques, c’est le moment où le peuple, qui est en Egypte en exil, franchit la Mer rouge. C’est cette nuit sainte ou Dieu fait alliance avec son peuple. Il le fait tellement que ce peuple naît de cette nuit sainte. Jésus veut vivre cette alliance. Et en fait, il va la renouveler. Il va en faire une nouvelle alliance, -on l’a entendu -, cette nouvelle alliance en son sang.
Alors nous aussi, nous voulons rencontrer Dieu et nous voulons faire alliance avec Dieu. C’est pour ça que nous sommes rentrés, qu’à la porte, nous avons considéré cette église comme la Jérusalem, le lieu adéquat pour notre rencontre avec le Seigneur. Et nous savons bien que cette Jérusalem céleste, elle est image de la Jérusalem de notre cœur.
II – A la rencontre du Père
Alors pourquoi vouloir rencontrer Dieu ? C’est le deuxième point. Le désir en nous… Nous avons un grand désir : c’est de nous élever. Nous voulons, d’une certaine manière, devenir comme Dieu. Et c’est plutôt une bonne idée parce que c’est bien ça le projet de Dieu. Dieu nous a créés à son image et à sa ressemblance. Alors, c’est inscrit dans notre nature. Et nous prenons parfois tous les moyens pour nous élever : et il y a des fausses pistes. Alors nous prenons des moyens humains : notre quête de puissance, notre quête de richesse, notre besoin de dominer les autres. Et aussi des moyens philosophiques : un Platon voulait se débarrasser de son corps pour que son âme puisse rencontrer le Seigneur, – Dieu -, ce qu’il appelait le monde des idées, la divinité. Voilà… Les stoïciens, les gnostiques, ou même certaines façons de vivre comme le New age… Se débarrasser un peu de tout ce qui nous encombre. Et en fait, on oublie que l’on se débarrasse un peu de notre humanité en même temps. Vous savez : yoga, reishi et autres pratiques qui ne sont pas centrées sur Dieu. Alors c’est un échec ! Et un exemple frappant, c’est saint Augustin, qui pendant qu’il était catéchumène, au bout d’un moment se dit ‘Dieu, c’est trop compliqué. On le voit pas, on le sent pas. Il vaut mieux se débrouiller par nous-mêmes’, – il a fait beaucoup de philosophie -, mais ça ne l’a pas comblé et ça ne l’a pas élevé.
Nous avons besoin, pour être effectivement élevé, nous avons besoin d’une force qui nous attire. Et dans notre monde, -vous le savez aussi bien que moi -, il y a deux grandes forces : une, celle qu’on rencontre souvent… qui nous tire vers le bas. Celle qui nous attire vers le mal, celle qui nous attire vers nos égoïsmes, vers nos mensonges… Et puis il y en a une autre, qui est plus délicate, qui est plus discrète. C’est celle qui veut nous élever. C’est l’attraction, l’Amour de Dieu. Jésus Lui-même. ‘Quand je serai élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à Moi’.
III – Tournons-nous vers le Seigneur
Alors il nous faut choisir. Et c’est le troisième point. Nous allons le dire tout à l’heure (il chante) : ‘élevons notre cœur… nous le tournons vers le Seigneur’. Nous le tournons vers le Seigneur. Nous choisissons notre pôle d’attraction. Nous choisissons de tourner nos cœurs vers Dieu Lui-même, car sans Lui, nous ne pouvons rien faire. C’est Jésus Lui-même qui nous le dit : ‘sans moi, vous ne pouvez rien faire’. Tout ce que nous ferons sera vain. On va croire que ça marche ! Et puis généralement, le soufflet se dégonfle… Vous savez, certains d’entre vous ont dépassé les vingt ans. A vingt ans, on croit que tout est possible. Et même si on essaie de le mettre en œuvre, on se rend compte à quarante que ça ne nous suffit pas tout à fait. Et j’en parle pas quand on a soixante ou plus. Nous ne pouvons être élevés que si nous nous tournons vers le Christ. C’est Lui qui nous attire. Et nous pouvons avancer sur son chemin à Lui. C’est intéressant de revoir les rites d’aujourd’hui.
Nous sommes entrés. Le roi qui rentre dans sa ville, normalement il est sur un cheval de guerre. Et Jésus choisit une ânesse. Le roi qui rentre dans sa ville, il est acclamé. Ça, c’est ce qui s’est passé. Et le roi qui entre dans sa ville, il est invité à être installé sur un trône. Et nous savons quel a été le trône de Jésus. Le trône de Jésus a été la croix. Sa cour, des soldats moqueurs. Le choix de Jésus, ce n’est pas de choisir son entourage. Les gens l’acclament ? Qu’ils l’acclament ! Lui ne change pas. Les gens l’insultent, se moquent de Lui, le bafouent, le crucifient… Qu’ils fassent tout cela. Lui ne change pas. Il témoigne et Il aime. Il aime.
En fait, tout ce que l’on a entendu revient à un mot, que l’on méditera particulièrement jeudi… ‘Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même’. C’est bien ce que Jésus fait pour nous. Et nous, nous sommes invités à aimer de la même manière, et pour cela, il nous faut nous accrocher au Seigneur et le suivre de près dans les grandes joies de l’accueil de Jésus, – l’accueil triomphal à Jérusalem -, et dans les grandes détresses de la Passion et de la mort. Et nous savons qu’au bout, c’est bien la résurrection qui nous attend.
Accueillons ce mystère, laissons-nous convertir, laissons-nous aimer, afin d’aimer nous aussi.
Merci Père Gaël, j’aime bien cette façon de nourrir notre propre concret du concret du Christ avec des termes simples et directs.