Homélie 21
avril 2019 pâques
Par l’abbé Gaël de Breuvand
Avec 9
baptêmes d’enfants au cours de la messe
C’est la transcription d’une prédication
orale, les titres sont ajoutés après retranscription
Quelques mots sur cet événement qui va arriver à ces enfants, quelques mots sur ces mots bizarres que j’ai chantés tout à l’heure dans une langue qu’on ne comprend pas. Mais pourquoi est-ce qu’il chante ça ? « Victimae Paschali », c’est un texte qui a été écrit au VIII-IXe siècle et on a l’habitude de le chanter à Pâques, sur cet air-là depuis tout ce temps-là. Donc c’est bien de garder les traditions. Qu’est-ce que ça dit ? « À la victime pascale, chrétiens, offrez le sacrifice de louange ». Et peut-être qu’on réfléchir quelques instants sur ce qu’est ce sacrifice de louange.
I – Le but de nos vies : le bonheur ! par l’offrande…
Quelle est notre vie, pourquoi sommes-nous faits ? C’est une vraie bonne question. Et quand on réfléchit un peu, en philosophie, de notre expérience humaine, que voulons-nous tous au fond de nous ? Être heureux ? Être dans la joie ? Je pense que c’est ça, non ? On est tous d’accord ? On signe ? On vote ? Je veux bien être heureux, je veux bien être joyeux. C’est pour ça que nous sommes faits. Et Dieu nous a créés pour ça. C’est d’ailleurs pour cela que, dans l’Évangile selon saint Matthieu, le premier mot c’est « heureux ». « Heureux les pauvres, le royaume des cieux est à eux. » Vous savez, Il le dit huit fois d’affilée. Alors, comment être heureux ? C’est la grande question, car nous avons tous des idées. Et il y a des idées qui sont de bonnes idées, et des idées qui donnent l’impression d’être des bonnes idées… Il y en a qui donnent effectivement de la joie, et il y en a qui donnent des fausses pistes. Alors, être le plus riche, c’est une fausse piste. Être le plus puissant, c’est une fausse piste aussi. Nous savons que nous sommes créés à l’image de Dieu. C’est la première page de la Bible. Nous l’avons entendu hier : « créés à l’image de Dieu ». Cela veut dire que nous faits pour être comme Lui. Et vous savez ce qu’est Dieu ? « Dieu est Amour ». Ils (les enfants qui vont être baptisés ont répondus) le savent. Dieu est Amour. Et qu’est-ce-que c’est que aimer ? C’est se donner pour la joie de l’autre. Vous savez, quand je me marie, j’aime l’autre, je me donne pour sa joie et son bonheur. Quand on se marie, on espère une petite réciprocité. Quand on est parent, on a des enfants parce qu’on veut leur joie et leur bonheur ; là, la réciprocité est moins évidente. Il y a quand même des moments de joie, des moments de retour. Et puis, Dieu nous aime, Il nous aime absolument gratuitement, Il n’attend rien de nous. Mais, comme Il nous a faits à Son image, eh bien notre bonheur et notre joie, nous la trouverons en aimant. Et qu’est-ce que c’est aimer ? C’est se donner. Et vous savez quel est le mot un peu technique pour dire se donner de façon totale et complète ? « Sacrifice ».
Sacrifice. Le
sacrifice ce n’est pas d’abord une question de sang, d’animal qui meurt, de feu.
Non, le sacrifice, c’est d’abord une question de vie donnée. Et, de fait, les
Anciens avaient bien compris ça. C’est encore un texte que l’on a entendu hier
soir. Ils disaient : eh bien s’il faut offrir la vie, la vie à Dieu, eh
bien, on va tuer des gens et l’offrir à Dieu. Et c’est là où Dieu dit : ‘non, vous n’avez pas tout compris ; ce
n’est pas la vie des autres que Je veux, c’est la vôtre. Et Je ne veux pas de sang,
Je veux juste votre temps, votre énergie, votre amour’. Alors, il y en a
qui se sont dits : ‘très bien, nous
allons faire un grand temple à Dieu, on va quand même on va offrir des
sacrifices d’animaux, on priera Dieu, et puis pour le reste, on s’en fiche’.
Et là, ce sont des générations de prophètes qui ont pris position et qui ont expliqué :
‘non, non, vous n’avez pas tout compris,
si vous voulez aimer Dieu, eh bien il faut aimer les autres, c’est lié :
« Écoute, Israël, le Seigneur est
l’unique Seigneur. Tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton
esprit. »’ Ça, c’est un sacrifice. « Et tu aimeras ton prochain comme toi-même. ». Ça c’est la
Bible, l’Ancien Testament.
Et Jésus va même un peu plus loin : « Aimez-vous, les uns les autres, comme Moi, Je vous ai aimés. »
(En montrant la croix) Là, on réfléchit
quinze secondes à comment Dieu nous a aimés. Oui, c’est bien un sacrifice,
ultime, total. Alors oui, offrez le sacrifice de louanges. C’est cela que
chante cette séquence de Pâques « Victimae
paschali ». Pourquoi est-ce que nous offrons ?
En fait, c’est déjà un sacrifice de
reconnaissance : merci Seigneur. Parce que Tu viens nous aider, nous
apprendre, nous donner la force, nous donner la joie d’aimer.
II – Nous étions perdu, il nous a retrouvés
Alors, après dans ce texte de la séquence, il y a un moment qui est marrant – cela va être la deuxième partie -, parce tout cela s’accomplit avec la résurrection du Christ. Jésus est mort, Il a donné Sa vie. Tout le monde avait l’impression que c’était foutu, que c’était fini, Jésus était mort, bien mort, et qu’Il ne reviendrait pas. On l’a entendu dans l’Évangile : « les disciples n’avaient pas compris qu’il fallait que Jésus ressuscite ». Ils n’avaient pas compris ; et, de fait, pour nous non plus ce n’est pas forcément très clair, ressusciter. C’est presque plus simple de croire en la réincarnation. Mais, non, Il est ressuscité. Il n’a pas changé de corps, c’est le Sien. Et qui est le premier témoin de la résurrection ? Encore la séquence, qui dit : « Dis-nous, Marie-Madeleine, qu’as-tu vu en chemin ? » Le premier témoin de la résurrection, c’est Marie-Madeleine. Et pourquoi ? Parce qu’elle a beaucoup aimé. Elle va au point du jour, à l’instant même où il est permis de travailler, parce que le samedi c’était le grand sabbat, la grande fête de la Pâque des Juifs, et donc on ne travaillait pas du tout. Et à l’instant où on éteint les lumières de la nuit pour entrer dans le jour, à ce moment-là, on peut reprendre des activités normales. Et Marie, immédiatement, elle veut aller prendre soin du corps de Jésus. Et là, elle arrive : surprise. Jésus n’est plus là ! Jésus n’est plus là ! Est-ce qu’elle comprend quelque chose ? Non. Elle ne comprend pas, elle est un peu perdue, alors elle se dit : ‘je vais aller demander à Pierre’. C’est bizarre d’aller demander à Pierre, c’est celui qui a trahi… Mais il est revenu… Et Pierre et le disciple bien-aimé vont courir au tombeau et reconnaître que cette absence, c’est le signe d’une présence. C’est très paradoxal : cette absence est le signe d’une présence. Si Jésus n’est pas au tombeau, c’est qu’Il est ailleurs, et s’Il est ailleurs, c’est qu’Il est vivant ! Alors, on n’aurait que le tombeau vide, on ne pourrait peut-être pas aller jusque-là. Et donc Pierre et le disciple bien-aimé s’en sont retournés chez eux, et Marie Madeleine, elle, elle reste près du tombeau, et elle pleure. Elle n’a toujours pas compris. Et il y a un homme, elle se dit : ‘c’est le jardinier’, elle se tourne vers lui et lui demande « Où as-tu mis le corps de Jésus, que je puisse en prendre soin ? » C’était Jésus, qui lui dit : « Marie ».
III – À la racine de notre foi : le témoignage, et la rencontre personnelle
Voilà sur quoi se fonde notre Foi dans la Résurrection. Des témoins, dignes de foi, Marie, et Paul fait toute une liste : Marie, Pierre, Jean, les apôtres , et ensuite plusieurs disciples, ceux qui étaient sur le chemin d’Emmaüs, et ensuite cinq cents à la fois, plein de monde a vu Jésus, a mangé avec Lui, a touché Jésus. Alors, c’est vieux, c’est ancien, presque 2000 ans, et pourtant, depuis, on se le transmet. C’est un témoignage qui est véridique. Mais, là encore, cela ne suffirait pas, pour que huit d’entre nous, neuf en comptant le bébé, et trois encore après la messe, et pendant des mois après cette messe, beaucoup de bébés vont être baptisés. Pour que tous ces baptêmes aient lieu, il faut quelque chose de plus. C’est que Dieu le Christ veut entrer en relation avec nous directement. Il veut nous parler. On ne L’entend pas avec nos oreilles, on ne Le voit pas avec nos yeux, mais on Le sent dans notre… cœur (Victor à répondu). Merci Victor, on le sent dans notre cœur. Il est là, Il est ressuscité, ça change tout. Et c’est pour cela que l’on a fait des trucs délirants ! C’est pour cela que l’on a construit des églises qui font 400 mètres de long et 93 mètres de haut, et que si elles brûlent la question n’est pas d’avoir un beau lieu pour les touristes, un milliard d’euros pour des touristes, ce ne serait pas juste, ce serait disproportionné. Non, mais si c’est le lieu privilégié où nous pouvons rencontrer Dieu, alors là ça vaut le coup. Comme tout à l’heure, si on privilégie Dieu et qu’on laisse tomber les hommes, cela ne marche pas non plus, car cela va ensemble. On ne peut pas séparer les deux. Et, de fait, cette église est ouverte à tous. À tous. À tous… Vous avez compris que je pourrais parler comme ça pendant des heures, mais je vais m’arrêter.
Première conclusion : se convertir
Aujourd’hui la Résurrection du Christ est l’occasion de se poser cette question : et pour moi, le Christ est-il vraiment vivant ? Est-ce que ça change ma vie que de savoir que Jésus est vivant ? Est-ce que j’accepte de me laisser emporter dans ce mouvement qui va me donner la vraie joie et le vrai bonheur, dans ce mouvement qui est celui de l’amour ? Est-ce que j’accepte de prendre mon temps, mon énergie pour louer Dieu, lui dire merci ? Est-ce que j’accepte de prendre mon temps, mon énergie pour servir mes frères ?
Deuxième conclusion : les missions du huilé
Je conclus –
deuxième conclusion – parce ça, c’est exactement ce que l’on trouve dans les
rites que nous allons vivre maintenant : les rites du baptême ; nous
mettons l’eau, signe de l’Esprit Saint qui va s’installer dans le cœur de ces
enfants. Signe de l’Esprit Saint qui est dans notre cœur. Et puis, ensuite on
va oindre avec de l’huile. En grec, l’huile se dit « chrisme », c’est
le mot qui a donné « chrétien ». En fait, si on traduisait le mot « chrétien »
cela voudrait dire « huilé ». On a de la chance que cela vienne du
grec, sinon on dirait de nous qu’on est des « huilés. En fait, au départ,
c’était pour se moquer de nous. Et puis, l’huile c’est important. Quand on est
huilé, c’est qu’on est choisi par Dieu pour être un messie – ça veut dire huilé
aussi -, pour être un Christ, pour être un envoyé ; et un chrétien qui est
connecté au Christ par le baptême, il a trois missions :
la première, c’est d’être un prêtre.
Le peuple tout entier est prêtre, cela veut dire que dans sa mission propre,
votre mission, notre mission, il y a de porter le monde dans notre prière.
Chaque jour, quand vous prenez un petit temps de prière, vous êtes chrétien,
votre prière est au Christ, le Christ porte le monde par vous. Belle
mission ! D’où l‘intérêt de prier tous les jours : nos églises sont
ouvertes, n’hésitez pas à y rentrer.
Deuxième mission : prophète !
Prophète, c’est le fait de parler de Dieu, ou de témoigner de Dieu : cela
va ensemble, si je parle mais que je ne fais pas, cela ne fonctionne pas. Le
prophète par excellence, c’est Marie-Madeleine : elle va annoncer la Bonne
Nouvelle : « J’ai vu Jésus, le
Ressuscité ».
Et puis, la troisième mission, c’est Roi.
Alors nous, pense au roi pharaon qui s’assoit sur son trône, qui se fait
servir. Mais, dans la Bible, un roi, c’est d’abord un berger. Et le berger,
s’il s’assoit sur son caillou et dit aux brebis « venez me servir »,
ça ne va pas marcher. Non, le bon roi, le bon berger, c’est celui qui se met au
service de ses brebis. Et le roi, par excellence, c’est bien évidemment Jésus.
Et jeudi dernier, nous avons célébré ce moment essentiel de la royauté du
Christ, où Il a déposé son manteau, Il s’est mis aux pieds de ses disciples et
Il leur a lavé les pieds.
C’est cela que d’être roi. Prêtre, prophète et roi : « Écoute, Israël, le Seigneur Dieu est l’unique Seigneur. Tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, et de tout ton esprit, et tu aimeras ton prochain comme toi-même. »