Homélie du 13 janvier 2019, année C
Par l’abbé Gaël de Breuvand.
Il s’agit de la transcription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après transcription.
« Dieu éternel et tout puissant, quand le Christ fut baptisé dans le Jourdain, et que l’Esprit Saint reposa sur Lui, Tu l’as désigné comme ton Fils bien-aimé. Accorde à tes fils adoptifs, nés de l’eau et de l‘Esprit, de se garder toujours dans Ta sainte volonté » : c’était l’oraison de ce jour. Jésus est désigné comme le Fils bien-aimé, et nous, nous sommes désignés comme les fils adoptifs. Ce sera donc notre plan : le Fils bien-aimé, et les fils adoptifs.
I – La manifestation du Fils
bien-aimé
Dans la deuxième
lecture, la Lettre de saint Paul à Tite, il y a un mot qui revient trois ou
quatre fois… Savez-vous lequel ? C’est le mot « manifester ». « La
grâce de Dieu s’est manifestée pour
le salut de tous les hommes ». « Lorsque Dieu notre Sauveur a manifesté
Sa bonté et Son amour pour les hommes », « nous attendons que se réalise la bienheureuse espérance, la manifestation de la gloire de notre Dieu
et Sauveur Jésus-Christ ». « Manifestation », « manifester »…
Vous savez que ce mot en français c’est la traduction du mot « épiphanie ».
Aujourd’hui, le baptême de Jésus est une « manifestation » de
Dieu : c’est une épiphanie. Il y en a eu une la semaine dernière, c’était
l’Adoration des Mages ; il y en a eu il y a quinze jours, trois semaines,
c’était la naissance de Jésus, et l’Adoration des bergers. Et aujourd’hui, il y
en a une : Dieu se manifeste en Jésus. Il y en aura une, plus tard, assez
marquante, ce sera la Transfiguration. Des manifestations du Seigneur.
Cette manifestation, vous l’avez entendue, elle est assez extraordinaire. Et,
pourtant, il n’y a pas beaucoup de témoins. Comme tout le peuple se faisait
baptiser et après avoir été baptisé lui aussi, Jésus priait. Il est là, à l’écart.
Il est en relation avec Dieu Son Père, dont on sait qu’ils sont Père et Fils depuis
toute éternité. Le Verbe est Verbe de Dieu depuis toujours : au
commencement, avant même le commencement, Dieu est Dieu. Dieu est Père et Fils
et Saint-Esprit depuis toute éternité. Et voici que Dieu incarné, Jésus, est en
relation privilégiée avec son Père. Et dans sa relation privilégiée, il le fait
avec son corps, et c’est pour cela qu’il a besoin de prendre un peu le temps de
prier. À ce moment-là, le ciel s’ouvre, l’Esprit-Saint descend sous l’apparence
d’une colombe, et on entend une Voix. C’est une chose à la fois extraordinaire,
et en même temps, le seul qui le raconte c’est Jean le Baptiste. Donc ce n’est
pas si visible, et pourtant cela a bien marqué quelque chose.
Qu’est-ce que cela signifie ? De fait, il y eu une hérésie qui s’appelle
l’arianisme – qui était au ive
siècle – qui disait : ce jour-là, l’homme Jésus a reçu l’amour de Dieu
dans sa Vie, et à ce moment-là, il est devenu Dieu… ou il est devenu comme
Dieu. Alors, évidemment, ce n’est pas juste : on sait que Jésus est Dieu à
l’instant même de sa conception, déjà, dans le sein de sa mère, Il est Dieu. Et
il était Dieu depuis toujours, « avant
qu’Abraham fût, je suis », dit Jésus. Mais lorsque Jésus est baptisé
et que l‘Esprit descend sur Jésus, cela ne change rien à sa divinité mais, par
contre, cela change tout à l’Humanité. C’est la première fois qu’un homme
reçoit l’Esprit en son entièreté : la totalité de Dieu descend en un
homme. Et nous – parce que nous sommes nous aussi des êtres humains, nous
sommes frères, au sens frères de sang, certes cousins-germains ou issus, issus
de germains, mais nous sommes frères et sœurs de sang du Christ – nous recevons
aussi, à ce moment-là, l’Esprit-Saint. Il nous est donné. Nous avons le même
père que Jésus… Ce père, c’est notre Dieu, un Dieu d’amour, qui nous aime,
qui veut notre joie et notre bonheur. Un Dieu qui veut s’approcher de nous, qui
veut habiter parmi nous. Un Dieu qui nous invite à être ses enfants, ses fils.
II – Il fait de nous ses fils adoptifs
Ce sera, dès
lors, notre deuxième point : nous, fils de Dieu… comme Jésus !
Puisque nous avons été créés par Dieu, nous sommes Ses créatures. Il y a une
relation entre nous qui est tout à fait privilégiée, mais qui est une relation
de subordination. Nous dépendons de Dieu. C’est une relation qui n’implique pas
immédiatement d’amour. Pour les musulmans, par exemple, les hommes sont juste
créatures de Dieu, et il n’y pas de relation d’amour entre Dieu et les hommes
et entre les hommes et Dieu. C’est une relation qui se limite à une relation de
soumission. C’est déjà bien de l’avoir perçu cela : Nous sommes effectivement
absolument dépendants de Dieu.
Par les prophètes, par l’histoire de tout le peuple d’Israël, par la venue de
Jésus, nous savons quelque chose en plus : c’est que Dieu veut faire de
nous Ses enfants. Il nous a créés pour nous faire héritiers de Sa vie. Il veut
nous inviter à plus de joie et de bonheur. Non, Il ne nous demande pas de la
soumission, Il nous demande d’accueillir son Amour et de le lui rendre :
qu’il y ait un échange, un dialogue, une conversation, une amitié, un amour.
Alors, Il veut faire de nous Ses fils, comme le disait saint Paul: Ses fils adoptifs. Alors on pourrait
penser, comme notre civilisation d’aujourd’hui le laisse sous-entendre, que des
fils adoptifs sont des enfants de deuxième zone. Mais non, à l’époque romaine
en particulier, mais c’est également vrai aujourd’hui, l’enfant adoptif, c’est
au contraire celui qui a été choisi entre mille : tu es mon enfant que j’ai choisi. Et de fait, vous le savez bien,
vous qui êtes parents : vos enfants, il a bien fallu que vous les ‘adoptiez’.
Ce n’est pas seulement le produit de mon corps, il y a eu un choix, une
décision : c’est mon enfant. Et, de fait, Dieu veut nous adopter comme Ses
enfants, Il fait de nous Ses fils, Ses héritiers, Ses amis. Alors, réjouissons-nous
pour cela, c’est une bonne nouvelle : nous sommes partie prenante de Son
projet ! Il veut la joie et le bonheur de chacun de nous. Nous sommes
invités à participer à ce travail : nous sommes appelés à accueillir la
joie dans nos vies. Nous pouvons décider d’être dans la joie. Nous sommes invités
à donner de la joie à ceux qui sont autour de nous : cette joie que nous
recevons de Dieu.
Le jour de notre baptême, nous devenons pleinement fils et filles de Dieu, connectés
au Christ, et nous participons à Sa mission. Comme Jésus, Dieu tout entier
vient s’installer en nous. Nous nous mettons à ressembler, par le baptême, un
peu plus à Jésus. S’accomplit, alors, la promesse du Satan au jardin de la
Genèse : « Vous serez comme des
dieux ». Mais oui ! Nous devenons comme Dieu par le baptême. Réjouissons-nous !
Au jour du baptême, on met un peu d’eau – c’est ce que nous avons vécu tout à
l’heure – on plonge (baptiser c’est cela). Plongés au nom du Père, du Fils et
du Saint Esprit, autrement dit dans Dieu, qui est tout entier amour : plongés
dans l’amour de Dieu. Nous recevons l’Esprit-Saint qui vient s’installer en
nous. Et si nous tendons l’oreille, celle de notre cœur, nous pouvons entendre
cette parole : « Toi, toi, tu
es mon enfant bien-aimé, en toi, Je trouve Ma joie ». Alors, réjouissons-nous…
Parce que, si nous accueillons cette qualité d’enfant de Dieu, de fils de Dieu,
de fils adoptif, nous sommes la cause de la joie de Dieu. C’est notre mission,
celle de participer à la joie de Dieu. C’est pour cela que l’Église a reçu cette
mission de créer, de donner beaucoup d’enfants au Seigneur. C’est pour cela que
le Christ nous dit « Allez ! Enseignez
toutes les nations et baptisez-les ! ». Pour que le Père puisse
dire à chacun « Toi, tu es Mon enfant bien-aimé, en toi, Je trouve Ma joie. »
Aujourd’hui, alors que nous faisons mémoire du baptême du Seigneur, et par là-même de notre propre baptême, nous pouvons renouveler notre engagement. Oui, le Seigneur vient, Il veut habiter notre cœur. Et notre engagement, c’est d’ouvrir notre porte. « N’ayez pas peur ! Ouvrez toutes grandes vos portes au Christ, car Il donne tout, Il n’enlève rien »*. N’ayez pas peur ! Ouvrez toutes grandes vos portes au Christ, cela changera votre vie, pour votre joie et pour la joie du monde entier.
* Benoît XVI lors de sa messe d’intronisation