Homélie du 31è dimanche du TO, Année B, 4 novembre 2018
« Quel est le plus grand des commandements ? » C’était une question capitale débattue en Israël. A l’époque, faut-il le rappeler, on pouvait recenser jusqu’à 613 préceptes, dont 365 interdictions, que même les légalistes les plus avisés ne pouvaient prévaloir de connaître réellement et encore moins d’observer, comme l’exigeait la tradition. On comprend dès lors la démarche empressée de cet homme en quête d’un principe unificateur aux nombreuses prescriptions légales héritées de Moïse.
Chers amis, bien avant le Christ, certains prophètes avaient essayé de condenser toutes les obligations de la loi dans quelques règles claires et précises. C’est ainsi que David résuma tout le Pentateuque (les 5 premiers livres de la Bible) en 11 prescriptions que nous trouvons dans le Psaume 15. Plus tard, le prophète Michée en réduisit le nombre à 3 (Mi 6,8) et le prophète Habacuc considérait comme unique commandement la fidélité à Dieu (Ha 5,4).
Interpellé à ce sujet, Jésus répond en citant deux passages de l’Ancien Testament parfaitement connus de ses auditeurs. Pour accomplir la loi, dit-il, il suffit d’aimer. Et voilà l’essentiel de toute religion est ramené à ce qu’il y a de plus universel en l’homme : l’amour.
Remarquons tout d’abord que dans sa réponse, Jésus refuse d’éliminer l’homme au profit de Dieu ou de renier Dieu au bénéfice de l’homme. En effet, l’amour de Dieu ne peut exister là où fait défaut celui de l’homme ; de même l’amour du prochain ne peut être réellement profond et constant s’il ne s’appuie pas sur celui de Dieu. L’histoire enseigne qu’une religion édifiée uniquement sur l’amour de Dieu se transforme souvent en un extrémisme meurtrier tandis qu’une civilisation construite sur la haine de Dieu se retourne contre l’homme, produisant des formes avilissantes de totalitarisme ou de fascisme.
« Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Concernant l’amour du prochain, le Christ indique également une mesure : l’amour que l’on a pour soi-même. Un tel amour n’est pas réservé à ceux qui nous aiment, ni à ceux qui nous font du bien ; il va au-delà de nos liens familiaux et offert même aux ennemis. Il n’attend pas de récompense parce qu’il prend sa source en Dieu et de lui reçoit sa plénitude. Un tel amour conduit au don de soi et au pardon sans limites.
Commentant ce passage, saint Augustin écrivait : « Aime et fais ce que tu veux. Si tu te tais, tais-toi par amour ; si tu parles, parles, parle par amour ; si tu corriges, corrige par amour, si tu pardonnes, pardonne par amour. Aie au fond du cœur la racine de l’amour : de cette racine, rien ne peut sortir de mauvais ».
Au sujet de la puissance de l’amour, Pierre Teilhard de Chardin disait : « Un jour, quand nous aurons maîtrisé les vents, les vagues, les marées et la pesanteur, nous exploiterons l’énergie de l’amour. Alors, pour la seconde fois dans l’histoire du monde, l’homme aura découvert le feu.
Cessons de nous montrer la blancheur de nos dents dans un sourire alors que nos cœurs sont fermés. Soyons vrais envers nous-mêmes et envers les autres.