Afin que vous soyez attachés au Seigneur sans partage
Par l’abbé Gaël de Breuvand,
Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale. Les titres sont ajoutés après retranscription.
Alors en conclusion de cette deuxième lecture, cette lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens, il y a peut-être le cœur de notre dimanche. « Tout cela, c’est afin que vous soyez attachés au Seigneur sans partage ». Du coup, c’est déjà une première question que l’on peut se poser, nous, chacun : est-ce que nous voulons être attachés au Seigneur sans partage ? Et lorsqu’on reprend la première prière de la messe, l’oraison, on a demandé quelque chose ; qu’est-ce qu’on a demandé ?
« Accorde-nous Seigneur, de pouvoir t’adorer sans partage, et d’avoir pour tout homme une vraie charité ». Cette prière, est-ce que nous ne la disons qu’avec notre bouche, et surtout, nous n’y mettons pas notre cœur ? Ou est-ce que nous voulons vraiment prendre ces mots-là au sérieux ? Est-ce que nous voulons vraiment être attachés au Seigneur sans partage ?
C’est une question à laquelle nous sommes invités à répondre. En fait, si on pouvait appeler les deux dimanches qui viennent de passer, les « dimanches de l’appel », aujourd’hui, on pourrait peut-être appeler ce dimanche le « dimanche de la réponse ».
I – quel que soit notre état de vie : être attaché au Seigneur
Alors reprenons justement cette deuxième lecture, qui est un peu… quand on la lit comme ça, elle est un peu surprenante quand même. Parce qu’on a quand même vraiment l’impression que saint Paul nous explique qu’il est bien mieux de ne pas être marié parce que comme ça, on peut s’occuper du bon Dieu, alors que quand on est marié, on a quand même un vrai problème, c’est que les hommes sont obligés de s’occuper de leur femme et les femmes sont obligées de s’occuper de leur mari. C’est quand même vachement compliqué, quoi.
Évidemment, si on le lit comme cela, on fait un peu un hors-sujet. Et on a peut-être à reprendre le contexte dans lequel saint Paul écrit. Saint Paul, il répond à des questions. Et il répond aux questions des Corinthiens, qui sont donc grecs. Et il faut bien imaginer que dans les civilisations antiques, y a une chose qui n’est pas bonne du tout, mais pas du tout : c’est d’être célibataire. Célibataire sans enfant, c’est le comble de la malédiction. Et donc du coup, il y a un vrai regard péjoratif sur tous ceux qui sont dans cette situation. Or il se trouve que saint Paul lui-même et quelques disciples sont célibataires, tout engagés pour le Royaume de Dieu. Et donc saint Paul, face à cette situation, leur explique que si, on peut être célibataire et être tout donné à Dieu et donc que cette situation de célibataire n’est pas forcément une malédiction.
En fait, ce qu’il explique, c’est que ce qui est essentiel, quel que soit notre état de vie, c’est d’être consacré à Dieu ! Que toute notre vie soit attachée au Seigneur, sans partage. Et que ce chemin d’union au Christ, eh bien selon chacun de nous, ce sera un chemin différent. Il y aura le chemin particulier des gens mariés qui rencontreront le Christ et qui seront attachés au Christ à travers leur époux. Puis il y aura le chemin particulier de ceux qui sont célibataires et qui ont consacré leur vie à Dieu directement. Mais en fait, on passe quand même à travers des personnes pour s’unir à Dieu.
Cette tentation des Grecs à vouloir mettre de côté la notion de célibat, – cette dévalorisation du célibat -, c’est finalement à la base une tentation dualiste. Chez les Grecs, ils ont une petite tendance à penser que le corps et l’âme, c’est vraiment deux choses différentes ; Et que globalement le corps, ce n’est pas bien du tout, et que l’âme, çà c’est bien ! Donc du coup, on va avoir deux tendances, deux réactions possibles : c’est de se dire, soit ce que je fais avec mon corps ne compte pas donc je peux faire n’importe quoi. Évidemment, en le disant on se rend bien compte qu’il y a quelque chose qui cloche. Ou bien au contraire, il faut que je maltraite mon corps pour qu’il se plie vraiment à ce que mon esprit doit pouvoir atteindre. Évidemment, ni la première position, ni la deuxième ne sont bonnes ; Nous sommes chrétiens et nous savons que nous sommes créés par Dieu tout entier : être humain, homme et femme, corps et esprit. Et que tout cela est destiné à être purifié. Tout cela est destiné à être sanctifié. Toute cela est destiné à être attaché au Christ. Aussi bien mon corps que mon cœur.
II – Purifié, unifié par « celui qui fait grandir »
Dans l’évangile, Jésus fait œuvre de libération. Il dit une parole d’autorité. L’autorité, ‘auctoritas’ en latin, c’est ce qui fait grandir. Celui qui a autorité sur quelqu’un, c’est pour le faire grandir. Pas pour l’écraser. Et Jésus, avec sa parole d’autorité, est capable de libérer, est capable d’unifier celui qui est divisé, de libérer celui qui est emprisonné. On le constate bien : « un homme tourmenté par un esprit impur…». La première chose qu’il crie, c’est : « que nous veux-tu ? » Il est tout seul ! Et pourtant, il est tellement divisé en lui-même qu’il parle au pluriel. « Que nous veux-tu ? Es-tu venu pour nous perdre ? » Alors le Christ va le libérer. Le Christ va le simplifier, le purifier.
Vous savez ce que c’est qu’un…, – il y en a certains qui ont du faire de la physique ou de la chimie dans les temps anciens -, il y a ce qu’on appelle un corps pur. Un corps pur, par exemple, c’est un bloc d’or. Il y a qu’un seul type d’atome dans ce bloc. Donc c’est des atomes d’or. Donc c’est un corps pur. Un bloc de fer aussi, c’est un corps pur. Par contre, il y a d’autres matériaux qui sont des corps composés, composites, et qui ne sont donc pas des corps purs. Finalement, c’est cela être purifié, c’est être rendu simple. Être rendu à l’image de Dieu, tout entier. Finalement, la purification, c’est le moment où tout ce qui n’est pas semblable à Dieu est écarté de moi. Et ce n’est pas forcément confortable. Saint Pierre utilisait une comparaison en disant que pour être purifié, pour être rendu semblable à Dieu, il fallait être comme l’or, fondu au creuset ! Donc dans une chaleur très forte, on fait fondre l’or et les morceaux qui ne sont pas de l’or, bah eux, ils ne fondent pas. Et donc du coup, on peut les sortir de là. Et puis là, on constate que Jésus donne cette parole : « tais-toi. Sors de cet homme ! » Et là, il y a convulsion. Grand cri. Et seulement alors la libération est faite. Ce n’est pas confortable. Et pourtant, c’est nécessaire et cela libère véritablement l’homme.
III – Seigneur fais grandir en moi le désir de sainteté
Alors en constatant cet esclavage, cette impureté finalement que subit cet homme, et que Jésus est capable de libérer, nous pouvons nous pencher sur notre situation à nous. Est-ce que vous êtes des corps purs ? Est-ce que en vous, il n’y a que Dieu ? Ou est-ce que en vous, Dieu a toute sa place ? Est-ce que vous êtes pas esclaves de certaines choses qui finalement, ne nous aident pas à vivre et non sont pas vraiment là pour notre joie et notre bonheur.
Alors on va regarder chacun nos vies. Puis on va constater que oui…, – parce qu’il ne faut pas se leurrer -, on est tous esclaves de quelque chose. Ce peut être un esclavage à l’argent, aux écrans, au confort… Je ne sais. Vous savez mieux que moi ce qu’il y a dans vos vies. Chacun de nous, nous avons nos esclavages. Est-ce que nous voulons nous présenter devant le Seigneur et lui dire : “Seigneur, fais-moi un cœur sans partage. Libère-moi de ces esclavages”. C’est cela hein… C’est la grande question de notre vie. Est-ce que nous voulons choisir le Christ dans toute notre vie ? Est-ce que nous croyons vraiment que le Christ est notre joie et notre bonheur ? Que seul, Il peut nous combler ? Cette question-là, elle est peut-être difficile. Et peut-être que nous n’arriverons pas à y répondre immédiatement.
Alors déjà peut-être, la première question, c’est… la première demande que nous pouvons faire à Jésus, c’est toujours celle que nous avons dite : “accorde-nous Seigneur de pouvoir t’adorer sans partage. Et si j’en ai pas encore très envie, parce que je ne perçois pas encore vraiment à quel point c’est bon pour moi, alors, Seigneur, remplis-moi de ce désir. Convertis-moi. Change-moi. Purifie-moi Seigneur. Parce que, comme le dit saint Paul, je le sais, ce que tu me proposes, c’est ce qui est bien. Et ce qui est bien, c’est d’être attaché à toi sans partage”.