Par le père Grégoire Kornprobst, supérieur du séminaire Saint Irénée
Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale.
J’imagine que si nous sommes ici ce matin pour célébrer la messe, eh bien, il y a quand même une raison. Je ne pense pas que beaucoup d’entre nous soyons ici par hasard, ou par habitude, ou sans y avoir réfléchi, ou par convention sociale ou je ne sais quoi… Aujourd’hui, en 2018, pour venir à la messe le dimanche matin, il faut le vouloir, je dirais : il faut l’avoir décidé. Il faut qu’il y ait bien une raison qui fait que dans notre vie, nous avons décidé, le dimanche matin, de consacrer ce temps au Seigneur.
Et effectivement, c’est vrai, – enfin je n’en sais rien, j’imagine que c’est ça -, puis aussi pour beaucoup des jeunes qui sont ici, je pense qu’il y a beaucoup de vos camarades qui ne seront pas allés à la messe ce matin. Quand vous parlerez de votre week-end lundi, avec vos copains et vos copines, il y en a peut-être pas beaucoup qui auront été à la messe aujourd’hui.
Ce qui est la raison pour laquelle nous célébrons le jour du Seigneur, eh bien, c’est que notre vie chrétienne s’appuie sur une rencontre du Christ, quelle qu’elle soit. C’est l’évangile d’aujourd’hui. C’est l’évangile d’aujourd’hui où André et l’autre disciple, Jean, André et Jean font cette rencontre de Jésus qui change leur vie et toute leur vie ensuite, elle aura été bâtie ensuite sur cette rencontre de Jésus qui nous est expliquée. On nous donne certains détails, assez étonnants, puis il y a des choses assez importantes que l’on ne nous dit pas.
Le détail : c’est qu’on sait à quelle heure ça s’est passé. Saint Jean écrit un évangile. Il écrit toute la vie de Jésus. Il veut y mettre l’essentiel. À la fin de l’évangile, il dit qu’il aurait pu écrire beaucoup d’autres choses, beaucoup de miracles de Jésus, mais qu’il ne l’a pas fait pour pas que ce soit trop long. Mais là, il prend le temps de dire à quelle heure il a rencontré Jésus : « c’était vers la dixième heure »… donc ça, c’est à l’époque, on comptait comme ça, et donc on nous dit environ 4 heures de l’après-midi. Ça veut donc dire que ça l’a marqué. Parce que cet évangile, il l’a écrit des années, des années après cette rencontre qu’il a eue avec Jésus. Mais ça l’a tellement marqué qu’il se rappelle de l’heure. Et il veut nous dire, non seulement qu’il s’en rappelle, mais il veut nous dire justement : “je me rappelle de l’heure”. Il y a eu un moment dans sa vie où il a fait cette rencontre avec Jésus.
Cette rencontre, elle est pas tombée du ciel non plus. Elle a été préparée. Saint Jean et saint André ont d’abord été les disciples de Jean-Baptiste. Donc ils suivaient Jean-Baptiste. C’était des juifs pieux, qui aimaient Dieu, qui suivaient la Loi juive, qui désiraient avoir une belle vie, une vie droite, une vie juste, une vie selon les commandements de Dieu. Et donc ils aimaient écouter Jean-Baptiste qui proclamait la Parole de Dieu dans le désert. Et donc, on ne nous dit pas dans le détail combien de temps ils ont été les disciples de Jean-Baptiste, mais ils l’ont été. Et c’est Jean-Baptiste qui leur a dit : “maintenant, suivez cet homme, c’est l’Agneau de Dieu”.
Donc il y a eu toute une préparation, – on ne sait pas combien de temps -, avant que Jean et André rencontrent Jésus. Et puis alors, évidemment, la chose très importante qu’on aimerait savoir et qu’on sait pas, c’est ce qui s’est passé quand André et Jean ont été chez Jésus. Parce qu’ils ont suivi Jésus. Jésus leur dit : « que cherchez-vous ? » Ils ne savent pas trop ce qu’ils cherchent. Ils disent pas ce qu’ils cherchent. Ils disent : « maître, où demeures-tu ? » Ils savent pas encore exactement. Et Jésus leur dit : « venez et vous verrez ». Ils vinrent, ils demeurèrent et ils restèrent auprès de Jésus, mais on ne sait pas ce que Jésus leur a dit ou a fait avec eux. Il y a quelque chose qui nous échappe, d’important, dans cette rencontre que André et Jean ont faite avec Jésus.
De la même façon d’ailleurs que dans la première lecture, Samuel aussi, disons, fait une rencontre de Dieu. On a toute la préparation à cette rencontre où Dieu appelle Samuel plusieurs fois et Samuel met un peu de temps à répondre. Mais au moment où Samuel dit : « parle, ton serviteur écoute », Hop ! On nous dit pas ce que Dieu a dit au cœur de Samuel. C’est normal, parce que parmi nous, tous encore une fois, si nous sommes là, c’est que d’une façon ou d’une autre, nous sommes en relation, nous avons fait une expérience. Nous sommes en relation avec Jésus. Mais cette relation avec Jésus, elle est très différente selon chacun. Elle peut prendre des formes très variées.
Certains d’entre nous peut-être, ont fait une expérience très forte à un moment donné, un peu comme saint Jean et saint André, où ils peuvent dire : “à tel moment dans ma vie, j’ai vécu telle chose et je peux y reconnaître l’irruption de Dieu dans ma vie”. En se rappelant très bien le moment, le jour, les circonstances, ce qui s’est passé en moi à ce moment-là… Le désir de retourner à la messe, le désir de lire la Parole de Dieu, le désir de témoigner de sa foi, un grand Amour qui nous saisit dans le cœur… enfin. Il peut y avoir des tas de choses différentes.
Et puis d’autres, peut-être, c’est plus diffus. Il n’y a pas comme ça un événement très précis, une heure très précise, un moment très précis où l’on peut dire : “j’ai rencontré Jésus”. Mais… Vous l’avez rencontré ! Les personnes qui sont dans ce cas-là l’ont rencontré. Sinon, vous ne seriez pas là ! Sinon, nous ne serions pas là ! Simplement, ça demande peut-être de relire sa vie. De voir comment le Seigneur, eh bien, a fait alliance avec moi tout au long de ma vie. Et en relisant sa vie, on s’aperçoit qu’à tel ou tel moment, eh bien il s’est passé peut-être telle ou telle chose… “je ne m’étais pas aperçu à quel point cela avait fortifié ma foi”. Je ne m’étais pas aperçu à quel point cela allait fortifier ma foi par la suite, mais quand je prends le temps de faire cet exercice, un petit peu de relecture de ma vie devant le Seigneur, eh bien, je suis capable de voir comment Dieu m’a accompagné. Comment j’ai fait cette rencontre personnelle. Comment en venant ici à la messe le dimanche matin, c’est bien par Amour du Christ et pour aimer le Christ.
La première lecture, elle a été lue par une jeune fille, … je sais pas quel âge… (il se tourne vers la jeune fille). Elle a dix ans. Tu t’appelles comment ? … Brune ! Alors c’est Brune, qui a dix ans qui a lu la première lecture. C’est très intéressant parce que la première lecture, c’est justement le Seigneur qui appelle Samuel dont on nous dit qu’il est… (Il s’adresse aux scouts devant lui) Il avait quel âge Samuel ? À ton avis ? Neuf ans ?… On sait pas quel âge il a, mais on nous dit que c’était un enfant. Ce qui veut dire que Dieu n’attend pas qu’on ait 15, 16, 17, 20, 30, 40, 60, 75 ans pour parler. Il a parlé à Samuel quand il était un enfant. Donc, ici j’en vois quelques-uns d’enfants devant moi, il y en a aussi derrière… Dieu a parlé à Samuel quand il était un enfant. Ce qui veut dire que Dieu parle au cœur de tout homme et de toute personne, quel que soit son âge ; Et si les scouts qui sont ici, si vous êtes là, c’est bien que Dieu a parlé dans votre cœur aussi ! Je sais pas moi. Mais je pense que oui quand même. En tout cas à certains d’entre vous. En tout cas, c’est très important pour vous d’être attentif à ce que Dieu dit dans votre cœur. Et vous avez vu, Samuel, il a pas tout de suite compris que Dieu lui parlait. Dieu lui a dit : « Samuel, Samuel ! ». Au début, il n’a pas compris que c’était Dieu. Alors il est allé voir Élie, un prêtre. “Tiens, qu’est-ce qui se passe ? ” Puis Dieu a continué : « Samuel, Samuel ! ». Et Samuel n’a pas encore compris que c’était Dieu. Il lui a fallu un peu de temps pour comprendre que c’était Dieu qui parlait dans son cœur. Alors ça, parfois, ça peut aussi nous arriver. On comprend pas tout de suite que l’expérience que nous vivons, c’est Dieu qui parle à notre cœur. Et parfois il faut du temps pour dire : “ah bah oui Seigneur, c’est Toi qui est présent”.
Le mystère de la messe, il est absolument extraordinaire. Il nous dépasse complètement. Et il faut parfois un peu de temps pour comprendre quel mystère extraordinaire c’est que d’aller communier au corps du Christ, recevoir le corps du Christ.
En tout cas, vous pouvez dire, -évidemment, je m’adresse aux enfants mais c’est à chacun d’entre nous -, nous pouvons dire comme Samuel : « parle Seigneur, ton serviteur écoute ». C’est-à-dire que nous pouvons dire à Dieu, nous pouvons demander à Dieu qu’Il nous parle parce que nous sommes disposés à l’écouter. Alors Il va nous parler dans sa Parole, Il va nous parler à la messe, Il va nous parler à travers toute notre vie, tout ça, ça dépende de chacun. Ce qui est important pour nous, c’est de dire à Dieu : “j’ai des oreilles, eh bien je suis prêt à t’écouter”. Faisons cette prière comme Samuel. Demandons aussi comme saint Jean, de savoir, peut-être les plus âgés, de savoir nous rappeler des moments où nous avons pu repérer que Dieu est venu nous rencontrer dans notre vie. Voilà ces deux petits exercices pour cette semaine : « parle Seigneur, ton serviteur écoute » et nous rappeler quand, comment Dieu est venu nous visiter dans notre vie. Amen.