Par l’abbé Gaël de Breuvand
Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale, c’est pourquoi le style reste familier. Les titres sont ajoutés après retranscription.
C’est une bonne nouvelle, une grande nouvelle ! Dieu… est Amour ! Il se donne. Il se donne pour celui qu’Il aime et il se trouve que celui qu’Il aime, c’est moi ! C’est vous ! Chacun de vous… Il se donne tout entier pour notre joie et notre bonheur. Il s’est donné tout entier à Adam et à Eve. Et lorsque Adam et Eve ont refusé ce cadeau de Dieu, ont choisi de se servir plutôt que de servir Dieu…
Dieu nous recrée
Eh bien Dieu aime quand même, gratuitement. Et Il pose un acte qui s’appelle l’acte de pardon. C’est une re-création. En fait, lorsque l’on décide de ne pas aimer, – c’est ce qu’on appelle le péché -, on se coupe de l’Amour. Et lorsqu’on reçoit le pardon, lorsque Dieu pardonne, eh bien on redevient capable d’aimer. Et on redevient capable de faire ce pour quoi on est fait : et donc… aimer ! La joie redevient possible. Quand Dieu nous pardonne, Il nous reconstitue. Et plus encore depuis que le Christ est venu, et qu’Il a manifesté l’Amour, le pardon de Dieu pour nous sauver, nous tirer du péché dans lequel nous sommes un peu enfermés. Il nous constitue. Il nous constitue en tant que membre d’un peuple, en tant que membre d’un même corps, membre de l’Église.
Église. Quelques secondes de réflexion sur cette question : qu’est-ce que l’Église ? On le dit dans le Je crois en Dieu : ‘je crois en l’Église sainte’… Et là on se regarde, nous qui sommes membres de l’Église, et on fait : ‘waouh ! C’est pas tout à fait ça.’ Pourquoi ? Parce que l’Église elle est sainte parce que sa tête est sainte : le Christ ! Et que, la vie qui se répand dans l’Église, c’est l’Esprit saint. Pour autant, chacun des membres que nous sommes, nous sommes en chemin. Nous ne sommes pas une assemblée de parfaits. Nous ne sommes pas une assemblée de parfaits… Je pense que vous le savez. Nous ne sommes pas une assemblée de parfaits. Parfois, ceux à l’extérieur de l’Église croient que nous sommes des parfaits. On peut leur dire : ‘non, non, non, non… Je suis pas parfait du tout’. Par contre, nous sommes en chemin de perfection. Nous voulons avancer vers la perfection. Nous sommes en cours de re-création, car Dieu nous pardonne.
Dieu nous pardonne
Nous sommes bien une assemblée de pécheurs, une assemblée de gens qui, régulièrement, sont coupés de l’Amour de Dieu, et en même temps, sans cesse, Dieu pardonne et nous redonne la capacité d’aimer. Et le combat, notre combat, celui que nous sommes appelés à mener chaque jour, celui qu’était appelé à mener ce débiteur, qui devait 60 mille talents, 10 millions de pièces d’argent… C’est de vivre dans ce pardon. Vivre dans le pardon de Dieu. Accueillir le pardon de Dieu. Comment faire pour accueillir le pardon de Dieu. Eh bien, il faut… – Bah d’abord, on a besoin de ce pardon -, se laisser transformer, se laisser recréer, se laisser être à l’image de Dieu. Et la meilleure manière, c’est d’imiter Dieu. Et comme Lui pardonne, moi aussi je pardonne. Là, c’est frappant : ‘prends pitié de moi. Je te rembourserai tout’. Et le maître, saisit de compassion, lui remit sa dette. Et quelques instants plus tard : ‘Prends pitié de moi, je te rembourserai tout’. On aurait pu attendre la même chose ! C’est ce que Dieu attend… Eh non ! ‘L’autre refusa et la fit jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait tout remboursé’. Il se ferme absolument à l’Amour et se retrouve incapable d’accueillir pleinement ce pardon que Dieu veut lui donner.
Dieu nous recrée, Dieu nous pardonne… Sans condition ! C’est nous, qui pouvons mettre des conditions à ce pardon : soit nous l’accueillons, soit pas. C’est là qu’est notre liberté. Allons-nous accueillir l’Amour de Dieu dans notre vie ?
La vie même de Dieu en nos cœurs : la charité
Je vais revenir sur ce mot d’Amour de Dieu, qu’on appelle aussi la charité. Cette Agapè ! En grec, c’est un mot un peu barbare, hein… Agape : c’est le niveau le plus haut de l’Amour. Un Amour absolument gratuit qui se donne sans cesse, c’est l’Amour de Dieu. Cette agapè, cet Amour-là, il est implanté dans nos cœurs depuis notre baptême. Et Il grandit en nous. Il nous fait nous transformer en Christ un peu plus, chaque jour. Par contre, cet Amour, ce n’est pas un sentiment. Donc on ne le ressent pas forcément. Et Il grandit chaque fois que l’on vit les sacrements. Chaque fois que l’on communie, l’Amour grandit en nous. Chaque fois que l’on vit le sacrement de réconciliation, l’Amour grandit en nous. Il grandit en nous dans la vie de prière. Chaque fois que l’on entre en relation avec Dieu, même si ça ne nous fait pas plaisir, l’Amour de Dieu grandit dans notre cœur. L’Amour de Dieu grandit quand on pose des actes concrets de charité.
Mais cette charité dans notre cœur, elle peut aussi mourir. Nous le savons bien, c’est justement le péché. Le péché grave, voulu, conscient, tue l’Amour de Dieu en nous. Mais Dieu nous pardonne encore, il nous suffit d’accueillir son Amour…
Quand l’homme pardonne, il ouvre son cœur à l’action de Dieu
Je pardonne ! Mais ce n’est pas encore la réconciliation. Pour qu’il y ait réconciliation, il faut que l’autre partie fasse le bon pas. Dans le sacrement de la réconciliation, dans, même, la venue du Christ, Dieu pardonnait depuis toute éternité mais l’homme n’était pas vraiment capable d’accueillir ce pardon. Et c’est le Christ, Dieu lui-même, qui se fait Homme, afin de réconcilier le monde avec l’univers. Lui, accepte, accueille le pardon de Dieu, et Il nous entraîne dans ce pardon. Cet Amour de Dieu qui meurt dans l’âme de ce débiteur impitoyable. Il a reçu l’Amour ; il a reçu le pardon de Dieu, et il a refusé de poser l’acte. Il a refusé de vivre ces paroles du Notre-Père : ‘Pardonne-nous, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés’.
Il s’agit d’être Amour, il s’agit d’être à l’image de Dieu. Pleinement ! Dieu pardonne, et je suis invité à pardonner comme Lui. Est-ce que je peux le faire par mes propres moyens ? Est-ce que je peux le faire par mes propres forces ? En fait… c’est possible… C’est très, très, très ! difficile. Et on le voit bien, hein…ça peut être dans nos vies, – il suffit de regarder un tout petit peu autour de soi -. Dès qu’on parle d’héritage, c’est bizarre, les pardons sont tout de suite plus difficiles à donner. Dès qu’on parle de liturgie, les pardons sont beaucoup plus difficiles à donner. Y’a des sujets, comme ça… Dès qu’on parle de politique, les pardons sont beaucoup plus difficiles à donner. Et pourtant nous sommes invités à pardonner. En fait, c’est la condition de l’Homme. Si je pardonne, alors j’aime à la manière de Dieu et alors je suis en train de faire ce pour quoi je suis fait et je suis dans la joie.
Alors est-ce qu’il s’agit d’être une bonne poire ? Bah oui ! Celui qui pardonne, c’est celui qui accepte d’être le dindon de la farce. C’est celui qui accepte de se laisser avoir. Bah oui, il s’agit d’être une bonne poire. Il s’agit d’accepter de se laisser avoir. Il s’agit d’aimer à la hauteur du Christ. Le Christ, Il pardonne sur la croix : alors qu’il est en train de mourir et que tout est perdu à vue humaine.
Est-ce que c’est facile ? Non. C’est la condition de la réconciliation. C’est ainsi que nous chrétiens, unis au Christ, nous pouvons accomplir notre mission qui est de porter le monde. Nous portons le monde. On a entendu quelques paraboles qui parlaient du pardon la semaine dernière et la semaine d’avant, et vous remarquerez que Jésus, lorsqu’Il nous appelle à vivre le pardon, Il ne nous dit pas : ‘si tu as fait quelque chose de mal contre l’autre, va lui demander pardon’. Ce n’est pas ce que dit Jésus. Ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas le faire ! Ce n’est pas ce que nous dit Jésus. Jésus, Il regarde d’abord l’autre : ‘va te réconcilier avec lui, même s’il a fait quelque chose de mal contre toi’.
Alors il nous faut être comme Dieu, accepter d’être la bonne poire, en aimant tous ceux qui sont aimés autour de nous, car aimer comme Dieu, c’est aimer sans mesure, c’est aimer sans compter. Quand on aime, on ne compte pas et nous sommes invités à aimer encore et encore, et pardonner 77 fois 7 fois. Ça fait 539 ! En fait on peut faire encore plus. Laissons-nous aimer, laissons-nous pardonner,
Pardonnons.