Par le père Yves Baumgarten, Vicaire général du diocèse de Lyon
3 septembre 2017
(Il s’agit de la retranscription d’une prédication orale, c’est pourquoi le style reste familier).
Dimanche dernier, nous écoutions ce qui précède cet évangile que nous venons d’entendre aujourd’hui. La confession de saint Pierre. Pierre qui à la question de Jésus : ‘pour vous, qui suis-je ?’ fait cette belle profession de foi : ‘Tu es le Christ, Le fils du Dieu vivant !’. Et Jésus va instituer Simon-Pierre comme pierre de Son Église et ‘sur cette pierre, je bâtirai mon Église’, va-t-il lui dire. Et la suite, que nous entendons, eh bien, c’est la deuxième partie du message de Jésus d’une certaine manière où Il annonce sa passion, par sa mort pour entrer dans la gloire de la résurrection. Un seul et même texte qui a son unité.
Mais la profession de foi de Pierre est le socle. Le socle de toute chose. Et tout à l’heure, quand votre curé, le père Gaël de Breuvand, a fait lui-même sa profession de foi solennelle, devant Dieu, il ne faisait que reproduire, que s’inscrire, dans cette démarche ecclésiale. Depuis 2000 ans, l’Église, à travers ses pasteurs, à travers ses fidèles, ne cesse de proclamer cette même foi, une, en un seul Dieu : Père, Fils et Esprit. Une profession de foi que nous avons plaisir et joie à entendre et à proclamer comme nous le ferons tous, dans un instant, lorsque nous dirons ensemble ce même credo pour dire notre foi, qui est la foi de l’Église. Ainsi donc, le socle commun de l’Église, c’est notre foi. Notre adhésion au Christ, à celui qui est le Fils du Dieu vivant, nous le croyons. Lui qui nous invite à le suivre, même si c’est aussi une exigence difficile, comme nous l’avons entendu dans cet page d’évangile. Suivre le Christ, renoncer à soi-même, s’oublier soi-même, se donner à celui qui est notre vrai pasteur.
Et là aussi, eh bien le rôle d’un curé de paroisse, c’est cela. C’est de suivre le Christ, pas-à-pas, humblement, et avec foi, courage, détermination, avec résolution. Et s’il le fait, c’est pour lui-même bien sûr car on a tous besoin de suivre le Christ, mais c’est pour que vous tous, fidèles des paroisses de Chaponost et de Brignais, vous puissiez aussi le suivre, pour suivre vraiment le Christ. Le pasteur d’une paroisse, le pasteur d’un ensemble paroissial, c’est avant tout celui qui essaie de tenir la place du Christ pour que chacun puisse, en le voyant, en le regardant, en voyant aussi sa manière d’annoncer la foi, de vivre la foi de toute l’Église… eh bien que vous puissiez les uns et les autres vous associer, participer, collaborer avec lui et ainsi entrer dans ce peuple de Dieu, dans ce corps de notre Seigneur Jésus-Christ, nous qui en sommes tous les membres, sans oublier que le Christ est la tête.
Mais dimanche dernier, comme je le disais, nous avons vu Pierre proclamer la foi de l’Église. Jésus l’a institué comme pasteur de toute son Église. Et aujourd’hui, lorsque ce même Pierre, quelques instants après avoir professé sa foi en Christ, fils du Dieu vivant, il entend Jésus lui dire : ‘passe derrière-moi, Satan !’. Une proximité assez étrange : en un instant, saint Pierre est celui qui est le fidèle du Christ, celui qui a les belles paroles… et puis là, Jésus semble lui dire qu’il est celui peut-être qui va être un obstacle à cette mission. Car effectivement, Pierre, dans son cœur d’apôtre, dans son cœur de disciple, voudrait éviter à Jésus de connaître sa passion, sa mort, et en fin de compte lui éviter de vivre sa mission. Il y a là comme une proximité assez saisissante entre le bien et le mal, entre la bonne intention et l’intention qui n’est pas parfaitement droite. Et là aussi, nous faisons tous cette expérience que dans notre cœur, nous souhaitons tous le meilleur, le bien pour nous même, pour les nôtres, pour notre Église, pour nous-mêmes, notre société, dans laquelle nous vivons et pour laquelle nous souhaitons une paix, entre tous les hommes, et en même temps, il y a en nous quelque chose qui nous détourne de Dieu, qui nous détourne du bien, qui nous éloigne de Dieu… Cette proximité du bien et du mal, ce combat du bien et du mal qui est dans notre cœur, dans notre société, autour de nous, c’est aussi là le rôle du curé d’opérer un discernement. D’aider chacun à pouvoir y voir plus clair dans son cœur, dans sa vie. De pouvoir aider chacun… prendre soin de chacun, que chacun puisse se situer dans le bien et éviter le mal. Bien sûr, cela c’est le travail d’une vie, d’une existence. Et il ne suffit pas des conseils d’un prêtre, aussi saint soit-il, pour que nous soyons à l’abri du malheur et de la difficulté. Mais nous avons besoin de celui qui nous conseille, de celui qui nous guide, de celui qui nous apporte une parole de réconfort, de soutien, de celui qui nous visite aussi. Et c’est important aussi que le pasteur puisse venir visiter ses fidèles, leur apporter cette parole. Ce n’est parfois qu’une parole, – on ne peut pas trouver une solution à tous les drames humains -, mais de marquer cette sollicitude pour que justement, l’être humain puisse discerner dans son cœur ce qui est bon et ce qui est moins bon. Et aider l’homme à gagner, grandir en sainteté, en vérité sur le chemin du Seigneur. Voilà aussi quelle est la mission du pasteur et du curé de paroisse.
Et puis, je veux revenir aussi sur la première lecture, sur ce beau texte du prophète Jérémie, qui nous invite à considérer la parole de Dieu. Nous croyons dans cette parole, parce que la Parole de Dieu, c’est le Christ Lui-même, Il est le Verbe incarné venu en notre monde pour nous apporter la Parole du Père, Eh bien nous voyons comment Jérémie, lui, est habité par cette parole. Comme un feu dévorant qu’il ne peut retenir et qui coule de ses lèvres pour abreuver la terre, pour abreuver le monde. Voilà peut-être aussi la mission du curé de paroisse, de vivre de la parole de Dieu. De la méditer, de la prier, pour pouvoir la proclamer. La prononcer, l’interpréter puis la partager avec chacun d’entre vous. Un feu dévorant, une parole qui nous habite, une parole qui nous fait vivre, une parole qui donne vie à tous ceux qui l’entendent et qui l’écoutent. Voilà aussi une belle mission pour un curé de paroisse.
Enfin, revenons un instant sur la parole de l’apôtre saint Paul, dans sa lettre aux Romains. Où il résume un peu tout ce qui est la vie spirituelle. La vie spirituelle des uns et des autres. Qu’on soit prêtre, diacre, laïc, quels que soient nos états de vie, nous avons à prendre soin de notre vie spirituelle et à la développer et la faire grandir. ‘Je vous exhorte, frères, par la tendresse de Dieu, à nous présenter votre corps, votre personne toute entière, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu’. Voilà quel est le cœur de notre vie spirituelle : de nous donner. De nous donner comme serviteur, comme ami de l’Époux, comme ami du Christ, de nous donner entièrement dans toute notre personne. Et le prêtre, le curé de paroisse est signe de ce don, parmi nous, pour nous aider nous aussi à vivre de même.
Mais, la mission du curé est belle, et toute belle qu’elle soit, elle ne peut se vivre seule. Et c’est pour cela que vous aussi vous avez une mission en tant que paroissien. Eh bien de prendre soin de votre curé comme lui veut prendre soin de vous. De veiller sur lui pour lui permettre, lorsqu’il est peut-être fatigué, épuisé dans sa mission de l’aider, de le seconder, de collaborer avec lui, de répondre à ses appels, pour que tous ensemble, vous tous, vous puissiez bâtir une communauté vivante, riche. Une communauté ouverte sur notre monde, sur notre société, appelante et qu’ainsi, chacun d’entre nous, trouve sa place dans l’Église. Car l’Église a besoin de tout le monde. Et votre curé de paroisse a besoin de chacun d’entre vous, quelle que soit la tâche, aussi humble soit-elle, dans la prière, dans l’action, dans le service, dans la multitude des services que composent une paroisse. Votre curé a aussi besoin de vous.
Et la première chose que vous pouvez faire, c’est ce qu’il fait pour vous. Il prie pour vous. Et bien vous aussi, priez pour lui. Priez pour lui souvent. Pour qu’il soit rempli de cet Esprit de sainteté et de sagesse, pour être pour vous un bon pasteur.